Cannes 2014 : "Les Nouveaux sauvages" drolatiques et déjantés
4 / 5 ★★★★☆
Synopsis : Vulnérables face à une réalité trouble et imprévisible, les personnages de "Les Nouveaux Sauvages" traversent la frontière qui sépare la civilisation de la barbarie. Une trahison amoureuse, le retour du passé, une tragédie ou même la violence d’un détail du quotidien sont les détonateurs qui poussent ces personnages vers le vertige que procure la sensation de perdre les étriers, vers l’indéniable plaisir de perdre le contrôle. Unité de ton
Les films à sketches sont rares. En provenance d'Argentine encore plus. Très populaire dans les années 60 notamment en Italie et un peu en Grande-Bretagne, le genre s'est rapidement essoufflé. Il faut dire que l'exercice n'est pas facile ; entre hétérogénéité et unité, avec l'écueil de tomber dans l'inégalité entre les récits, ce qui est souvent le cas. L'Argentin Damián Szifron ne s'en tire pas trop mal, grâce à des piécettes jouant d'un humour noir ravageur, pointant sur des caractères humains exacerbés et des situations absurdes, kafkaïennes, voire surréalistes…
Le film parvient à associer thriller, comédie et fantastique dans chacun de ses pendants, sur une écriture assez réussie, constante et efficace sur sa durée de 2h00. Ce qui est en soit un exploit. La corde du cynisme est largement mise à contribution, tout en mettant en scène des personnages attachants et en pointant autant des traits psychologiques que des maux de nos sociétés occidentales. Si ce trait est commun au prologue et aux quatre sketches qui le suivent, ce caractère unitaire ne se retrouve pas dans un lien narratif. Est-ce un mal ? Cette volonté à lier les histoires entre elles s'est avérée souvent artificielle. Y passer outre n'est pas plus mal, surtout quand l'unification de l'ensemble se traduit par une unité de ton.
Références
"Les Nouveaux sauvages", chaudement applaudi pendant et à l'issue de la projection, n'en demeure pas moins mineur, même s'il détient nombre de qualités. Mais peut-être pas celles que l'on attend dans une compétition cannoise. En même temps, cela fait du bien de constater cette ouverture d'esprit des sélectionneurs envers un film atypique, et qui relève surtout de la comédie, même si elle est des plus noires, genre très rarement représenté dans la compétition et la sélection officielle.
On cite souvent "Les Monstres" (Dino Risi, 1963) et "Les Nouveaux monstres" (Dino Risi, Ettore Scola, Mario Monicelli, 1978), en regard de ces "Nouveaux sauvages", en raison des croisements comportementaux et une conjoncture, sur le ton de la dérision. Effectivement, une continuité persiste. Mais l'on pourrait tout autant faire référence à "Airport" (1970, George Seaton) pour le prologue, qu'à "Duel" (1971, Steven Spielberg), "Les tueurs de la lune de miel" (1970, Leonard Kastel), "Le Procès" (1962, Orson Welles) ou "Mariage" (1978, Robert Altman) pour chacun des sketches. Des Pairs assumés et revendiqués par Damián Szifron, ce qui relève souvent d'un premier film, ici sur un ton ludique, franchement drôle, mais sorti un peu de son contexte à Cannes.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.