: Témoignage #MeToo : "On n'est pas allés assez loin", regrette une activiste à New York, cinq ans après l'onde de choc
Il y a cinq ans, la parole des femmes se libérait sur les réseaux sociaux sous le hashtag" #MeToo", après les révélations de harcèlement sexuel qui ont fait tomber le producteur américain Harvey Weinstein. Depuis 2017, qu'est-ce qui a changé aux États-Unis ? Nous avons posé la question à une activiste new-yorkaise.
Que reste-t-il du mouvement #MeToo, cinq ans après son apparition aux États-Unis ? "It's a big question !", sourit Sophie Sandberg, new-yorkaise qui, en 2017, venait tout juste de fonder "Cat Calls" contre le harcèlement de rue. Cette activiste a vécu au premier plan le déluge de témoignages de femmes, en réaction aux révélations sur le producteur américain Harvey Weinstein.
A l'époque, l'association de la jeune femme prend son envol, portée par les prises de parole des femmes sur les réseaux sociaux. "Pour moi, c’était super, cela attirait l’attention sur mon action. Mais cette grande prise de conscience ne s’est pas accompagnée d’une attention au problème plus profond", regrette Sophie Sandberg. Le constat est, selon elle, le même : "On a toujours autant de signalements de harcèlement, et tant de gens y font face quotidiennement..."
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Encore beaucoup de frustrations
Elle ajoute que le mouvement aura tout de même fait tomber l'intouchable Harvey Weinstein. Mais si l'ex tout-puissant producteur américain de cinéma est maintenant en prison, il a fait appel. Le hashtag #MeToo a touché d'autres figures médiatiques, comme l'ancien gouverneur de New York Andrew Cuomo, poussé à la démission, ou encore la star du R'n'B R.Kelly, qui purge 30 ans de prison.
Des scandales qui ont fait grand bruit, mais sur le fond, alors, les choses ont-elles avancé ? Sophie Sandberg s'avoue alors "frustrée".
"Il y a eu des conséquences pour les gens de pouvoir, mais cela n’empêchera pas l’agresseur du coin de la rue d'harceler une jeune fille."
Sophie Sandberg, activiste féministe à New-YorkFrance Info
"On n’est pas allés assez loin", poursuit Sophie Sandberg, qui estime donc que le chemin est encore long : "On doit se concentrer sur ceux qui sont restés en dehors de cette vague, sur ce qui n’a pas marché, et continuer à partir de là", estime la jeune femme, qui ajoute que le tableau n'est pas totalement noir.
Car l'héritage de #MeToo peut aussi se vérifier dans le cadre législatif de 22 États. Des lois y ont été adoptées, destinées, par exemple, à rendre les lieux de travail plus sûrs. Certains ont allongé le délai de prescription pour les plaintes de harcèlement sexuel, d'autres interdisent désormais les accords de non-divulgation pour les règlements financiers avec les victimes. Des entreprises ont également introduit des politiques plus strictes en matière de harcèlement sexuel et de nouvelles formations.
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En parallèle, le mouvement aura fait réagir, parfois de manière violente, une partie de la population, attachée à vision patriarcale de la société. "Beaucoup d’hommes ont été énervés de voir les règles changer. Ils disent que le mouvement, que le féminisme sont allés trop loin. Et Donald Trump n’est qu’un exemple parmi d’autres de cela", décrit Sophie Sandberg.
Plus récemment, certains considèrent que la vague #MeToo est même morte après le très médiatique procès en diffamation entre les acteurs Johnny Depp et Amber Heard au printemps dernier. Les réseaux sociaux puis le jury avaient alors tranché en faveur de la vedette de Pirates des Caraïbes. Sophie Sandberg continue, elle, d'écrire à la craie sur le bitume de New York, les "Cat Calls", ces obscénités qu’elle entend dans la rue. Son mouvement compte près d’un millier d’activistes, dans une cinquantaine de pays.
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