Jul et Achdé, auteurs du nouveau "Lucky Luke" : "Oubliez l'Ouest américain, bienvenue à Paris !"
Ces derniers temps, Jul et Achdé se déplacent côte à côte dans leur marathon promotionnel pour "Un Cowboy à Paris" (éditions Dargaud). Quand nous les retrouvons pour l'interview, ils débordent d’enthousiasme et le scénariste a les bras bien chargés. Il a avec lui un livre de photographies : ce sont les archives iconographiques qui ont inspiré le scénario, puis guidé le dessin, du début à la fin de la réalisation de l’album. Un travail de documentation approfondi que nous détaillent les auteurs.
Jul, d'où vous est venue l'idée de camper votre "Lucky Luke" à Paris ?
Jul : Ce que j’aime dans les scénarios de Goscinny, c’est qu’ils sont basés sur des faits historiques avérés. Comme lui, j’ai fait beaucoup de recherches : je suis alors tombé sur une photo de la statue de la Liberté, avec cette main qui se balade jusqu’aux Etats-Unis. Par la suite, j’ai découvert qu’Auguste Bartholdi, son sculpteur, avait fait une tournée promotionnelle à travers l’Ouest pour trouver de l’argent et financer le socle du monument. Quelle histoire extraordinaire ! C’est elle qui m’a inspiré le scénario. La statue de la Liberté, c’est une icône. J’ai imaginé que Lucky Luke devenait son garde du corps.
La réalité historique que l’album dépeint fait-elle écho au monde d’aujourd’hui ?
Jul : Ce qui est drôle dans cet album, c’est qu’il parle de réalités historiques qui ont façonné nos modes de vie actuels. A l’époque, c’était par exemple le début du marketing de masse. La statue a été vendue avec plusieurs petites répliques en plâtre, des cartes postales… Elle avait été montée dans les ateliers Gaget, dans le 8e arrondissement de Paris. Ce sont eux qui ont inventé ce type de marketing.
Comment le dessinateur de longue date de "Lucky Luke" a-t-il reçu le scénario ?
Achdé : J’ai été très surpris par le sujet. Je trouvais l’idée épatante, mais complexe. Alors que je préfère dessiner de vastes plaines et des déserts avec des cactus, devoir croquer les rues du Boulevard Haussmann ou de la Gare Saint-Lazare, c’était une autre paire de manche.
Alors, comment vous y êtes-vous pris ?
Achdé : Je suis allé chercher de la documentation. Même si nous faisons du pastiche, de la caricature, nous nous basons sur un fond d’archives riche. Au niveau de l’image, j’essaye toujours de rendre compte d’une réalité historique.
De quel genre d’archives s’agit-il ?
Achdé : Pour "Un cowboy à Paris", le grand miracle est que la photographie naissante, au XIXème siècle, s’est emparée de Paris dès le départ. Les premières photographies capturaient des choses qui ne bougeaient pas, car le temps de pose était long. On a donc de nombreuses photographies de Paris et de ses rues. Elles ont constitué un fond très riche pour le décor.
Et les personnalités historiques qu'on croise ?
Achdé : A l’époque, toutes les personnes un peu fortunées ou la petite bourgeoisie se faisaient tirer le portrait. On appelait ça des "cartes de visite". Sous Napoléon III (le Second Empire), on s’échangeait donc ces fameuses cartes de visite avec photo. C’est de cette manière qu’on a retrouvé les portraits photographiques de toutes les grandes personnalités que Lucky Luke croise à Paris : Victor Hugo, Gustave Eiffel ou encore Auguste Bartholdi.
Pour dessiner la statue de la Liberté, avez-vous aussi trouvé des modèles ?
Achdé : La statue de la Liberté a la particularité d’être le premier projet dit "industriel" photographié de A à Z : du début à la fin de sa construction, on a toutes les étapes en images. C’est la première fois que la photographie n’est pas seulement artistique, mais aussi documentaire. Grâce à ces archives, on a pu directement incruster des photogravures d’époque dans l’album.
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