A Cuba, Janio Nuñez sculpte le tabac
Janio Nuñez travaille avec des feuilles de la région de Vuelta Abajo (ouest de Cuba), où on fait les cigares les plus fameux, du Cohiba au Romeo y Julieta. Il a sculpté des statuettes de Fidel Castro, Groucho Marx ou Compay Segundo. Grandeur nature, Winston Churchill, debout en trench coat et chapeau, Jack Nicholson hilare vautré dans un fauteuil club, Arnold Schwarzenegger en treillis et rangers ont demandé des mois de travail à ce quadragénaire malicieux.
Son obsession de la feuille brune odorante a failli tourner en maladie mentale. "Je voyais mes amis en tabac. Habillés en feuilles de tabac. Je rêvais de tabac. J'ai dû aller voir un médecin, un psychologue", explique Janio qui était alors "torcedor" (rouleur de cigares) dans un hôtel de Varadero, la grande station touristique de Cuba.
"Alors comme remède, une nuit, j'ai commencé à rouler des formes, des objets, tout en tabac brut. Ma première vraie pièce a été la tête de l'indien qui orne les cigares de la marque Cohiba."
Des oeuvres inspirées par des rêves, puis par Dieu
Janio passe trois semaine à forcer les barrages pour rencontrer le directeur de Habanos SA, le monopole d'Etat des cigares cubains. Celui-ci est séduit et ordonne que les oeuvres du sculpteur soient présentées dans le cadre de la Feria de La Havane en 1998, puis au premier Festival du Havane, l'année suivante.
Janio crée sa collection des "Fumeur célèbres", inculant Che Guevara, Charlie Chaplin, Luciano Pavarotti ou Compay Segundo. Après ces formats réduits, il se lance dans les oeuvres grandeur nature, avec Churchill, cigare à la bouche, acquis par un collectionneur italien vivant au Venezuela. Nicholson et Schwarzenegger ont disparu lors d'une exposition en République Dominicaine.
Janio a arrêté de sculpter quand il a rencontré Dieu. "Je voulais devenir célèbre, mais quand la célébrité m'est tombée dessus je n'étais pas prêt", confesse-t-il. Il devient pasteur évangéliste en 2006 et reprend la sculpture en 2008.
Installé depuis 2011 à Guanabo, au bord de la mer, il alterne petites pièces artisanales pour les touristes et les curieux et des œuvres plus ambitieuses, souvent inspirées de sa foi. Son dernier projet est une fresque qui s’appellera « Fondements de l’humanité ». "Dieu me la révélera", assure-t-il tout sourire en caressant avec passion ses feuilles de tabac.
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