Pierre Terrasson expose ses photos des années Gainsbarre
En 1984, lorsque Pierre Terrasson rencontre Serge Gainsbourg, "l'homme à la tête de chou" est déjà "Gainsbarre". "Le coeur percé de part en part" , il joue les provocations. Les médias exposent ses déboires affectifs, sa maladie, ses excès et son oeuvre prolifique en chansons, films et musique. Et c'est tout naturellement autour d'un appareil photo que les deux hommes vont sympathiser, d'artiste à artiste. Comme le raconte Pierre Terrasson, "Serge était photographe : lors de notre première séance de prise de vue, il a empoigné mon Nikon F2 24 mm. Chez lui, il avait le même." S'en suivra une relation personnelle et professionnelle intense.
Un dialogue d'artistes
Jusque sur la scène du Zénith en 1989, l'artiste fixe les différentes humeurs de l'icône. Lors d'une séance photo au commissariat d'Aubervilliers, les agents "étaient au garde à vous quand on a franchi la porte", confie le photographe. "On se trouvait là où ils m’avaient collé en garde à vue pour excès d’humeur un an auparavant. On a organisé un faux interrogatoire devant un faux flic : Serge jouait le jeu de l’acteur, souvent il mettait son oeil dans le viseur pour vérifier que la Marianne était bien dans le cadre." Résultat : une photo à message telle que Gainsbarre les affectionnait. La série de clichés prise dans le studio de Pierre Terrasson complète cette critique d'une République qui opprime.
En 2011, Pierre Terrasson a publié "Gainsbarre" (aux Editions Premium), un livre de photographies comportant des textes d'Alain Wodrascka et une préface de Dani dans lequel il dévoile une centaine de clichés parfois inédits et donne à voir le côté obscur du grand Serge.
Entrer dans l’intimité d’un artiste, c’est le but ultime que le photographe n'a eu de cesse de suivre pendant toute sa carrière. Après un diplôme d’arts plastiques à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-arts de Paris en 1978 et une année de restauration d’art à Berne (Suisse), il enseigne le dessin à Neuilly et la photographie au Centre d’arts plastiques d’Aubervilliers. Il débute la photographie lorsqu'il croise des artistes et des personnages parfois excentriques : les travestis des clubs parisiens, The Cure à Londres ou encore l'Opéra Carmen monté à Pékin par son père René Terrasson, alors directeur général de l’Opéra du Rhin.
Photographe de Mick Jagger, James Brown et Vanessa Paradis
Plongé dans le monde du rock, punk et new wave des années 80, il réalise des portraits et des reportages pour Rock & Folk, Libération, Actuel, VSD ou encore Le Nouvel Observateur. Tous ont croisé son objectif : Mick Jagger, U2, Tom Waits, the Cramps, the Ramones, Motörhead, James Brown, Tina Turner, the Clash, the Stranglers...
Les artistes français se sont aussi prêtés au jeu. Photographe exclusif de Vanessa Paradis, il suit la carrière de Rita Mitsouko, Alain Bashung, Téléphone, Daniel Darc, Elsa, Carole Laure, Jil Caplan, Elli Medeiros, mais aussi Patrick Bruel auquel il consacre un ouvrage paru en 2011 (toujours aux Editions Premium). Occasion de nouer des liens complices comme avec Axel Bauer. Le chanteur loue volontiers le talent de celui qui reste derrière l'objectif : "Pierre est un musicien de la photo qui tient ses appareils comme on tient une guitare, improvise comme un jazzman et se laisse aller dans l’inconnu", dit-il. Dans les années 2000, Pierre Terrasson travaille pour la nouvelle scène hip-hop et Raï émergeante en France : Khaled, Cheb Mami, Diams, Passi, Stomy Bugsy, Doc Gynéco... Aujourd'hui, il a tourné le dos au monde de la musique. Pour lui, la relation avec les stars n'est plus tout-à-fait la même. Il se concentre sur les portraits d'acteurs et de personnalités telles que Julie Delpy, Vincent Cassel et Wynona Ryder.
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