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Paris Photo 2021 : panorama de la création photographique en huit images

Après l'annulation de l'édition 2020, Paris Photo revient du 11 au 14 novembre, au Grand Palais Éphémère. Dans la vaste proposition de photographies présentées dans ce salon, nous avons sélectionné huit clichés de huit artistes à surtout ne pas rater.

Article rédigé par Christophe Airaud
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5 min
Martha Graham (BARBARA MORGAN)

Paris Photo, rendez-vous majeur pour le marché de la photographie, est de retour cette année après l'annulation de l'édition 2020. Du 11 au 14 novembre, 149 galeries sont représentées au Grand Palais Éphémère au Champs de Mars à Paris. Des galeries majeures aux émergentes, la foire est l'occasion de découvrir ou re-découvrir tous les styles et époques de ce médium, l'un des préférés des Français. De l'argentique au numérique, de la photo documentaire ou conceptuelle, pour en voir de toutes les couleurs ou en noir et blanc. Voici notre choix subjectif de huit oeuvres de huit artistes différents à surtout ne pas rater. 

Cy Twombly, un peintre photographe

La star du salon de la photo est un peintre. Connu pour ses toiles influencées par la littérature et le geste de l’écriture, l’artiste Cy Twombly durant toute sa vie a photographié.

Qu'il s'agisse des paysages apaisés de son lieu de naissance à Lexington en Virginie, des roses aux pétales délicats, ou des citrons un peu pourris, il se dégage une douceur, une intimité dans ces images. Ces mises au point floues frôlent la mélancolie. Les photographies de Cy Twombly sont présentées par la Galerie Gagosian.   

"St. Barth's", 2011 Color dry-print (CY TWOMBLY)

Pilar Albarracin bouscule les codes du macho espagnol

Le  parcours "ELLES X" met les artistes femmes en avant. Toujours une nécessité quand on sait que seulement 32% des artistes présents sont des femmes. Pilar Alabarracin, chez Georges-Phillipe et Nathalie Vallois, avait donc  évidemment sa place dans ce parcours. Elle vit et travaille à Séville et Madrid. Depuis 30 ans, elle incarne et explose dans ses images les stéréotypes de la femme espagnole. En détournant et en parodiant, elle dénonce avec une fausse légèreté. Militante et détourneuse de clichés, performeuse et joyeuse, ses images flashent comme les souvenirs d'une Movida d'antan. 

PILAR ALBARRACÍN
No comment

Courtesy Galerie GP & N Vallois, Paris
 (PILAR ALBARRACÍN)

De l'art brut chez Tomasz Machcinski

Un grain de folie et une extraordinaire histoire chez Christian Berst : Tomasz Machcinski depuis 1966, bien avant Cindy Sherman, s’est tiré le portrait 22 000 fois dans 22 000 personnages différents. Tour à tour, orphelin, SDF, ouvrier et artiste, ce Polonais bossu après une sale tuberculose, a créé ces rôles comme au théâtre, puis les a fixés sur pellicule.

A l’époque de la Pologne communiste, c’était de l'argentique en noir et blanc. Aujourd’hui, c’est du numérique en couleur. Un florilège de personnages historiques, anonymes ou travestis. Et comme il le dit lui-même : "ainsi je réalise mes rêves", de la photographie brute comme l'art. 

Tomasz Machcinski chez Christian Berst  (Tomasz Machcinski)

Elsa et Johanna, un road movie à deux

Elles aussi, se photographient et se glissent dans la peau de leurs personnages. Mais chez Elsa et Johanna, deux jeunes artistes françaises à peine trentenaires, c’est l’esthétique du cinéma et des séries qui domine.

Pour Find the truth chez La Forest Divonne, elles se sont installées à Calgary au Canada et ont bâti ce roman photo, ce road movie. Simon Baker, directeur de la Maison européenne de la photographie, les raconte ainsi : "Elles sont en quelque sorte davantage des actrices façon Actors Studio, et nous pouvons facilement les imaginer (…) conserver les vêtements de leurs personnages, après la séance photo, les porter quand elles rentrent chez elles, en voiture, passer leurs soirées et leur temps libre dans la peau de leurs personnages et peut-être même vivre dans les décors qu’elles utilisent."

@ Elsa et Johanna  (Less Home Elsa et Johanna Courtesy Galerie La Forest Divonne)

La terre s'effondre et Julien Guinand la photographie 

Peu de galeries racontent le dérèglement climatique et ses effets. Le marché en est frileux, on imagine le peu d'envie d'exposer chez soi la terrible face du monde qui nous attend. La galerie Francoise Besson a ce courage en montrant le remarquable travail de Julien Guinand.

Le photographe issu du monde des arts plastiques et des lettres a capturé durant trois séjours des travaux gigantesques au Japon suite à des glissements de terrain. Pour sauver des villages ou des habitations dans ces zones en péril, suite à la déforestation ou à l'exploitation minière, l'homme tente des sparadraps pour éviter le pire. Ces remèdes sur les terres sont comme "des pansements de béton couvrant les montagnes", écrit le photographe. Avec les images de Julien Guinand, la terre en souffrance ressemble à un corps malade, où la trace des soins devient une cicatrice illusoire.  

Photographie Julien Guiband  (Hongu, Tanabe.)

Une photographie de Luc Delahaye est un tableau 

Entre 1980 et 2000, photojournaliste membre des agences Sipa et Magnum, Luc Delahaye a couvert les zones de conflit. A l'orée du nouveau millénaire, son travail change d'angle et de point de vue. Et sur le stand de Nathalie Obadia, comment ne pas être stupéfait par ce portrait en pied d'un cultivateur sur une terre sèche. C'est frontal : le geste, l'allure, le réel sans artifices, le visiteur est d'emblée happé par le personnage. 

A l'occasion de son exposition où était exposée cette série, il y a un an, Luc Delahaye expliquait sur France Culture son travail dans ce village d'Afrique : "Je crois qu’avec ces photographies, plus qu’avec celles que j’ai pu faire dans le passé, je me suis attaché à dépasser la réalité objective, apparente, matérielle, et j’ai été tiré, un peu malgré moi, mais avec mon consentement, vers une autre dimension, peut-être un peu plus spirituelle". Une photographie documentaire, mais qui  flirte avec le pictural et le spirituel, avec l'universel.

Le Champ, 2019 (Luc Delahaye)

A la recherche d'Yulia Timoshenko

Dans la section "Curiosa", sorte de cabinet des curiosités, comme son nom l'indique, voici une série drôle, absurde et politique : Timoshenko's escape, présentée par la galerie Alexandra de Viveiros. La femme politique ukrainienne Timoshenko et sa coiffure en couronne tressée était l'un des symboles de la Révolution orange.

Son image était devenue un symbole. Lorsqu'elle devient prisonnière politique dans son pays, les deux artistes mettent en scène son évasion, imaginant une course poursuite dans les rues de sa ville. Ou comment la photographie se rebelle et se moque des pouvoirs totalitaires. 

série “Timoshenko’s Escape”, 2012 (Vladyslav Krasnoshchok & Sergiy Lebedynskyy courtesy Galerie Alexandra de Viveiros)

Engagée, militante: la photographie de la Sud-Africaine Sue Williamson

Engagement politique aussi, à travers le travail photographique de Sue Williamson, chez Dominique Fiat. Elle a aujourd'hui  80 ans, et elle est l'une des plus importantes artistes sud-africaines. Native du Royaume uni, sa famille part en Afrique du sud en 1948. En 2020, elle racontait son enfance dans Telerama : "Nous sommes arrivés en juin 1948, raconte l’artiste. J’avais 7 ans. En novembre de la même année, les élections ont donné la victoire aux nationalistes et marqué le début de l’instauration de l’Apartheid". Dans les années 70, cette photographe  blanche rejoint le combat contre l'Apartheid. Elle documente la ségrégation et aujourd'hui encore elle explore les discriminations qui continuent à hanter son pays, avec les nouveaux migrants arrivant d'autres contées africaines.  

Richard Belalufu, 2003 (Sue Williamson)

"Paris Photo" au Grand Palais Éphémère du 11 au 14 novembre au Grand Palais Ephémère. Une visite virtuelle de la foire est visible sur la Online Viewing Room de Paris Photo. 

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