Cet article date de plus de sept ans.

Le caméléon chinois Liu Bolin joue à cache cache tout l'été au festival Portraits de Vichy

L'artiste chinois Liu Bolin s'est fait connaître dans le monde entier grâce à son art du camouflage. Peint de façon minutieuse de façon à se fondre dans le décor, il disparaît magiquement des clichés. Une première rétrospective française de cet artiste caméléon est à voir à Vichy jusqu'au 10 septembre. Liu Bolin est également l'invité de la Surf Rider Fondation à Biarritz.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'artiste chinois Liu Bolin en train de se fondre dans un kiosque à journaux, en Allemagne, en 2013.
 (Bernd Weissbrod / EPA / MaxPPP)

Les métamorphoses de Liu Bolin

Dans un décor de déchets récoltés sur la plage par les écoliers, Liu Bolin a voulu dénoncer une fois de plus les dérives de notre société. Ici, à Biarritz, il a choisi comme thème la pollution qui défigure notre planète. Une performance exécutée pour la Surfrider Foundation et exposée dans le spa impérial de l'hôtel du palais.

Inciter les gens à  réfléchir, c'est l'ambition de Liu Bolin. Pour l'artiste chinois, le plus important est de réussir à exprimer quelque chose. Une  démarche militante, que l'on retrouve dans la galerie de portraits exposés à Vichy dans le cadre du festival Portrait (s) de Vichy. Près d'une soixantaine de photographies, appartenant à  la célèbre collection de Liu Bolin "Hiding in the city", sont installées sur l'esplanade du lac d'Allier, une esplanade très prisée des promeneurs.

"C'est la première fois qu'on présente en France mon travail de manière aussi complète", se réjouit Liu Bolin, très apprécié dans l'Hexagone.

Où est Liu Bolin ?

Figure de la bouillonnante scène artistique chinoise, Liu Bolin a acquis une reconnaissance internationale grâce à son art du camouflage. Revêtu d'une vareuse militaire, inspirée des costumes des années Mao, son corps est droit, immobile et ses yeux clos, méticuleusement repeints, se fondent dans le paysage. Si l'exercice de style est ludique - le spectateur pense inévitablement aux livres-jeux "Où est Charlie ?" - les oeuvres du plasticien caméléon sont avant tout un acte "de résistance passive".

A l'origine de son travail, la destruction sans préavis par le gouvernement de son atelier dans le village de Suo Jia en 2005, vue des travaux de préparation des jeux Olympiques de Pékin. "Derrière la raison officielle, il y avait une raison politique: le pouvoir ne voyait pas d'un très bon oeil la réunion au même endroit de 140 artistes", explique Liu Bolin.

Sans argent, sans matériel ni lieu pour créer, le sculpteur choisit alors d'utiliser son corps pour exprimer son indignation. "C'était un vecteur de communication avec les Chinois victimes eux aussi d'injustices", raconte l'artiste de 44 ans.
L'artiste chinois Liu Bolin devant une de ses oeuvres en plein air à Vichy, le 16 juin 2017.
 (Thierry Zoccolan / AFP)

Son travail critique la Chine moderne

Dans ses oeuvres d'apparence ludique, l'artiste cible avant tout les maux de la Chine moderne. Dans une série de clichés intitulée "Supermarché", ce maître ès invisibilité disparaît ainsi dans des rayonnages de légumes, de canettes de sodas ou de nouilles instantanées pour dénoncer les scandales alimentaires.

Dressé devant le Temple du Ciel ou une effigie de Mao, il questionne les symboles du pouvoir. Incrusté au milieu de pandas en peluche ou de téléphones portables, il dénonce l'entrée de la société chinoise dans la société de consommation. Dissimulé devant des kiosques à journaux et des "Unes" de magazines, il interroge la liberté d'expression.

Trublion mais pas trop : Pékin apprécie son travail

Mais à l'inverse de son compatriote Ai Weiwei, devenu la bête noire des autorités communistes, Liu Bolin assure "ne pas être en délicatesse" avec Pékin. "Les pouvoirs publics utilisent mes oeuvres pour dénoncer certains problèmes", assure celui qui travaille beaucoup à l'étranger depuis quelques années - Paris, Venise ou New York notamment.

Avec la série de photos "Art Hacker", il a interrogé, en 2016, l'art à l'heure d'Internet et des réseaux sociaux en se camouflant devant des célèbres toiles, comme "La Joconde" de Vinci, "Guernica" de Picasso ou "La Liberté guidant le Peuple" d'Eugène Delacroix.

Ses prochaines performances toucheront à l'écologie dans un cadre toujours plus universel. "J'essaie de faire le lien entre l'art et la société, de donner des pistes de réflexion en interpellant les spectateurs face aux problèmes économiques et sociaux."

Très populaire en France, Liu Bolin sera à l'honneur d'une autre grande rétrospective à la Maison Européenne de la Photographie à Paris, du 6 septembre au 29 octobre. Parallèlement, il investira la Galerie des enfants du Centre Pompidou du 9 septembre au 8 janvier prochain.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.