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La plasticienne Nicole Dufour au musée d'art contemporain de Taipeï
Du 12 juillet au 18 août 2013, le MOCATaipei Taiwan, accueille "Encorpsdages" une exposition de la plasticienne française Nicole Dufour. Depuis 30 ans, elle travaille le tressage et ses dérivés. L'exposition présente son travail sous forme de photographies, de vidéos et d'une série de tresses, ses fétiches, qui accompagnent le visiteur tout au long de sa découverte.
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Nicole Dufour tresse. Elle tresse ses cordes, elle tresse le raphia, elle tresse ce qu'elle trouve, là où elle le trouve. Elle peint, puis elle découpe ses peintures en lanières qu'elle tresse. Avec ses cordes, elle suscite la complicité de tiers, des amis, des inconnus, ses enfants, d'autres artistes. Certains manipulent les cordes rouge-sang, d'autres s'y laissent emprisonner, d'autres encore semblent les refuser. La plasticienne les photographie. Elle l'a fait en Inde, en France, au Bénin. Elle vient de le faire à Taiwan.
L'artiste a choisi une technique et la "déroule" depuis 25 ans au fil de ses découvertes, de sa progression dans l'imaginaire qui en découle, au fil des nouveaux matériaux qu'elle expérimente. Elle joue aussi sur les mots, eux-mêmes tressés sur un mode quasi psychanalytique. Si "encorpsdages" le titre de cette exposition lui a été soufflé par un ami poète, l'évènement a failli s'appeler "Mes tresses àTaiwan", évocation à peine cachée des usages possibles de la corde et du lien lors de jeux sexuels pour adultes avertis.
L'exposition que propose jusqu'au 18 août 2013 le MOCATaipei a été essentiellement composée lors d'une résidence de six semaines dans la magnifique demeure qui fut celle de Chiang Kai-shek, le dirigeant historique de la Chine nationaliste. Nicole Dufour avoue y avoir travaillé dix-huit heures par jour, créant notamment des dizaines de "fétiches". C'est ainsi qu'elle nomme ces tresses noires qui paraissent avoir été coupées sur des chevelures. Ces sortes de trophées primitifs pendent du plafond de l'exposition, se côtoient sur les bancs, sont accrochés au mur entre deux photographies. Ils sont partout s'offrant à l'imagination du visiteur qui y verra sans doute autre chose encore que ce qu'y a vu l'auteur de ces lignes. Les fétiches peuvent aussi évoquer des histoires d'amour ou des passions contrariées, on peut y voir des clés géantes ou des aiguilles à tresser d'autres tresses...
Née en Suisse, Nicole Dufour a vécu 25 ans dans différents pays d'Asie. Elle est depuis retournée en France et vit désormais dans l'Yonne.
Prochainement, elle partira pour le Japon qu'elle connait pour y avoir également vécu. Là, elle sait que son parti pris sera regardé de près et sans doute analysé différemment : le pays du soleil levant est en effet le grand praticien de l'art du lien, on appelle cela le "shibari". Il est le prétexte a une industrie photographique qui frôle souvent la pornographie. Les adeptes de cette pratique viennent de loin pour se faire attacher par les plus grands maitres de la discipline. Que verront-ils dans les oeuvres de Nicole Dufour ?
Taiwan, ou République de Chine, est une île séparée de la Chine Populaire par le détroit de Formose. Grande comme la Hollande et forte d'une
population de 23 millions d'habitants elle est considérée depuis 1949 par le régime de Pékin comme une province révoltée. Taiwan vit depuis 1949 dans
une situation de forteresse plus ou moins assiégée, selon les moments, par son immense voisine.
Lors d'évènements internationaux comme les jeux olympiques, elle est nommée "Chine-Taipei" pour éviter de froisser les susceptibilités de la Chine
Populaire. L'art s'y est développé avec une originalité toute taiwanaise notamment en ce qui concerne les arts plastiques et le cinéma.
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