L'agence Magnum, 70 ans, tente de se renouveler sans perdre son âme
"Le marché de la photo a totalement changé ces trente dernières années. Les journaux qui dépensaient beaucoup d'argent dans leurs photos ne le font plus. Nous avons donc dû investir dans de nouveaux projets et prévoir le futur", souligne ce patron britannique, de passage dans les bureaux parisiens de l'agence qui est aussi présente à New York, Londres et Tokyo.
Nicole Junkermann, co-fondatrice du site de paris sportifs Winamax, et l'investisseur norvégien Jörg Mohaupt ont apporté de l'argent frais à l'agence, qu'ils pourront convertir en parts dans une nouvelle filiale, Magnum global ventures. Le but de cet investissement est de faire revenir aux bénéfices à court terme l'agence photo qui a longtemps été dans le rouge.
"Cette transaction vise à corriger certaines faiblesses historiques de Magnum, sans lui faire perdre son âme", assure David Kogan, précisant que Magnum Photos resterait largement majoritaire dans cette filiale.
Une grande marque mais une organisation minuscule
"Pendant 70 ans, Magnum a affronté crise après crise (...) Pendant toutes ces années, Magnum produisait pour le marché très large de la presse, tout en gardant un côté très spécialisé et artistique", raconte-t-il."Nous ne rencontrons pas les mêmes difficultés que les grandes agences, ou les grands médias. Nous avons une grande marque, mais notre organisation est minuscule, notre approche est très individuelle, rattachée à nos photographes", précise-t-il.
Fondée le 22 mai 1947 à New York, Magnum reste la dernière grande agence photo en activité alors que l'agence Gamma a déposé le bilan en 2009, avant d'être rachetée par le photographe François Lochon, tandis que Sygma et Sipa ont été mises en liquidation, en 2010 et 2012 respectivement.
Tout le monde est devenu photographe
"Aujourd'hui, on a des centaines de milliards de photos prises chaque année. Tout le monde est devenu photographe", souligne David Kogan, lui-même ancien de la BBC et grand collectionneur de photos. "Certains voient ça comme une menace. C'est au contraire une opportunité unique si vous avez une grande marque dans l'univers de la photo, une opportunité de vendre des images à des jeunes adultes, de se connecter avec eux", estime-t-il.Le numérique représente désormais 27% du chiffre d'affaires de l'agence, qui organise des ventes de tirages, des expositions et des ateliers à travers le monde et annonce des cours de photographie en ligne. Avec son nouveau site internet, Magnum souhaite mettre en valeur son trésor de 600.000 clichés.
"Si nous pouvons investir dans le travail de nos photographes, qu'ils touchent un marché très large, et que nous utilisons notre présence en ligne pour faire connaître leur travail, qu'ils peuvent ainsi vendre des tirages ou donner des cours, ça renforce leur travail", explique le dirigeant. "Je pense que les reportages de qualité peuvent toujours se vendre", ajoute-t-il.
Combiner l'héritage avec une vision du futur
Magnum reste une coopérative dirigée par ses 92 photographes et représentants des disparus. L'agence continue de grandir et ses photographes ont coopté trois nouveaux reporters lors de leur assemblée générale cette année : l'Espagnole Cristina de Middel, l'Albanais Enri Canaj, basé en Grèce, et le Turc Emin Özmen."Je suis très conscient de la longue histoire de Magnum : il faut maintenant combiner cet héritage avec une vision du futur."
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