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La beauté animale au Grand-Palais

Cette exposition tombe à pic pour les vacances de Pâques, les enfants devraient être intéressés et émerveillés. Et les grands enfants surpris et observateurs.
Article rédigé par franceinfo - Thierry Hay
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Théodore Gericault: Tête de lionne. Vers 1819. 65 cm x 55.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais/Christian Jean.)

Bien sûr tout le monde croit connaître les animaux mais ceux qui n’ont jamais cessé de s’y intéresser ce sont les artistes, quitte parfois à les tuer pour mieux les dessiner. et oui.... Le Grand Palais a choisi la période allant de la Renaissance à nos jours et il y a une raison.

Jusqu’ à la fin du Moyen âge l’animal est symbole des vices et vertus ; il porte sur son dos et dans ses représentations les rumeurs et les craintes populaires. A partir de la Renaissance c’est l’observation de l’animal qui prime et celui-ci devient sujet à part entière : un changement colossal. Et les artistes ne cessent de l’observer dans le moindre détail, avec une rigueur toute scientifique, comme le prouve ce tableau d'un anonyme allemand qui est en fait un répitulatif des différents oiseaux.

Anonyme allemand: Les oiseaux. 1619. 141 cm x 96.
 (Musée des Beaux-Arts, Strasbourg, photo M. Bertola.)

De plus, à partir du XVI siècle, les progrès de l’imprimerie facilitent la multiplication des traités illustrés de zoologie. Comme les animaux sont vraiment beaux, le titre de l’exposition a vite été trouvé : « Beauté animale ».

Ce jour là, je suis le premier journaliste à être sur place, j’ai l’ impression d’avoir l’exposition pour moi et c’est très agréable. C'est un bel âne et un loup (1650) de Cinquozi qui m’ accueille, suivis de près par des insectes de Jan Van Kessel, une petite huile sur cuivre composée avec rigueur, comme une toile abstraite, avec en bas à gauche le beau vert d'une mante religieuse.

Jan I Van Kessel: Insectes et araignée. 1660.
 (Musée des Beaux-Arts, Strasbourg, photo M. Bertola.)

Le chat, lui, a eu un drôle de parcours. Longtemps il a incarné le diable avant de devenir le charmant petit minet qui dort sur le canapé. Malheureusement je n’ai pas pu, malgré mes tentatives, obtenir la photo d’un tableau de Goya tout à fait étonnant : "Combat de chats" (1786). Devant une belle lumière venant du fond, deux chats, les poils hérissés et les yeux gorgés de haine, s’observent.

C’est un atout de cette exposition que de donner l’impression d’être dans un grand grenier et de découvrir des tableaux rarement vus de très grands artistes, comme une étonnante chauve-souris orange de Van Gogh.

Mais revenons sur le plancher des vaches pour voir un cheval de Degas. La bête se cabre légèrement sur ses pattes arrière ultra fines.

Edgar Degas: Cheval carocolant. 1881-1890. Bronze.
 (Service presse Réunion des musées-nationaux-Grand Palais/Hervé Lewandowski.   )

La truite de Courbet a traversé la Seine pour passer du musée d’ Orsay au Grand Palais. La gueule ouverte, le poisson gît devant des tons ocres du plus bel effet.

Gustave Courbet: La truite. 1873. 98,5 cm x 65,5.
 (Service presse Réunion des musées-nationaux-Grand Palais/Hervé Lewandowski.)

Et  maintenant, place à une une star, plus exactement une starlette : un caniche de 1991 par Jeff Koons, la mèche relevée et l’air aussi fier qu’une présentatrice d’une mauvaise chaîne de télévision. Je ne suis pas fan de Jeff Koons, mais je dois dire que ce caniche reflète bien son époque : le paraître avant tout...

jeff Koons: Caniche. 1991. Bois polychrome. 58,4 cm X 100,3 x 52,1 cm.
 (Musée Collection Berardo / Fondation d'art moderne et contemporain.)

Le portrait du chien par les artistes voit le jour à la Renaissance. En 1548-1549, Jacopo Bassano a peint ces "deux chiens de chasse liés à une souche". Observez le regard attendri que le mâle porte sur la femelle aux beaux yeux...

Jacopo Bassano: Deux chiens de chasse liés à une souche. 1548-1549. 80 cm x 61.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais / Stéphane Maréchalle.)

Ce tableau de Bassano est considéré par les experts comme le premier portrait de chien. Le naturaliste Buffon a écrit : «La nature a réuni sur le paon toutes les couleurs du ciel et de la terre ». La toile datant de 1681 de Melchior D’Hondecoeter le prouve. Le dos du paon forme une diagonale qui répond à celle du feuillage et place le superbe orangé des plumes au milieu d'une croix en plein cœur du tableau.

Melchior D'Hondecoeter: paons mâle et femelle. 1681. 134 cm x 113.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais / Agence Bulloz. )

Je passe à la salle suivante et tombe nez à nez avec le museau d’une superbe lionne de Théodore Géricault. Une lumière douce sur un poil blond avec un œil plein d’autorité.

Théodore Gericault: Tête de lionne. Vers 1819. 65 cm x 55.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais/Christian Jean.)

Les organisateurs ont été durs de placer à côté une panthère peinte avec beaucoup moins de subtilité par un anonyme, mais c’est très bien car cela permettra aux enfants de faire la différence et de se forger le regard.

Une autre surprise m'attend dans lescalier menant au premier étage : à l’envers comme de coutume, une chauve- souris ailes déployées du sculpteur César. Sa ferraille ressemble à de la dentelle et donne au volatile de mauvaise réputation toute sa grâce.

César: Chauve-souris. 1954. Fer forgé. 144 cm x 215 x 12,1.
 (Collection Centre Pompidou. Distribution service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais / Adagp, Paris 2012.)

Avec la chauve-souris, on aborde un point délicat du monde animal : la beauté et la laideur. La chauve-souris, le crapaud et l'araignée ont toujours été considérés comme difformes, monstrueux et source de cauchemars pour les petits et les grands. Avec le singe l’ homme, y compris les artistes, marche sur des œufs. C’est vrai qu’il nous ressemble beaucoup. Alexandre Gabriel Descamps s’amuse ou règle ses comptes avec ce "singe peintre".

Alexandre Gabriel Decamps: Le singe peintre (déail). Vers 1833. 40,5 cm x 32.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand palais / Michel Urtado.)

Les artistes ont vite compris que le singe est le miroir de l’homme. Souvent il a été costumé et prié d’ imiter l’homme mais comme il n’y parvient pas parfaitement, cela nous rassure… Le sculpteur Pompon, lui, reste fidèle à son style en schématisant les formes, comme le prouve cette magnifique tête d’orang-outang en marbre noir.

François Pompom: Tête d'orang-outan. 1930. Marbre noir. 33,5 cm x 20 x 23.
 (Service presse Réunion des musées nationaux-Grand Palais / A.Morin / Gallimard. )

Cette tête prouve ce que les designers actuels doivent à Pompon. La fin de l'exposition concerne les ours blancs, espèce en danger, avec, d'une part; le célébrissime ours blanc de Pompon. Et, d'autre part, ce tableau de Gilles Aillaud où l'ours est déjà devenu une sorte de pierre, comme le montre ce détail.

Gilles Aillaud: Ours blanc. 1981. 190 cm x 150.
 (Musée d'art moderne de Saint -Etienne métropole / Yves Bresson / Adagp Paris 2012.)

D’ici quelques générations, cette sculpture et ce tableau seront peut-être les preuves de l'existence des ours polaires. Les organisateurs ont donc voulu finir par un signal d’alarme écologique.

Cette exposition tout public permet de mieux percevoir ceux que l’on pensait connaître : les animaux. Quelques grincheux diront peut-être que beaucoup d’œuvres viennent du Louvre mais le Grand Palais les met clairement en lumière et donne à chaque pièce exposée, connue ou pas, son espace vital grâce à une scénographie aérée. Cela permet de réfléchir au rapport, pas toujours au poil, que nous entretenons avec les animaux. La beauté animale n’est vraiment pas un vain mot et si vous ne me croyez pas allez au Grand Palais.

Grand Palais à Paris - tous les jours sauf mardi de 10h à 20h. Nocturne le mercredi jusqu'à 22h.

Entrée: 12 euros. www.grandpalais.fr

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