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L'oeuvre de Turner à la lumière de celle du Lorrain à Londres

William Turner vouait une grande admiration au paysagiste Claude Gellée, dit "le Lorrain", qui l'émouvait aux larmes. La National Gallery de Londres consacre une exposition à cette relation, avec une cinquantaine de toiles du maître anglais et une quinzaine de son aîné français (jusqu'au 5 juin 2012)
Article rédigé par franceinfo - Valérie Oddos (avec AFP)
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Joseph Mallord William Turner, Copie du Paysage avec l'arrivée d'Enée de Claude Lorrain, Studies for Pictures Sketchbook, vers 1799, aquarelle sur papier bleu, Legs Turner
 (Tate 2012)

Quand William Turner (1775-1851) commence à peindre, le Lorrain, né 175 ans avant lui, est si apprécié en Angleterre qu'il y est couramment appelé par son seul prénom, Claude. Ses toiles baignées de lumière, inspirées par ses voyages en Italie, séduisent les collectionneurs anglais, alors que l'Italie est la destination privilégiée des aristocrates.

Turner en larmes devant un tableau du Lorrain
Turner a une vingtaine d’années quand il découvre le Lorrain chez un collectionneur à Londres. « Il se sentit tout chose, se troubla et fondit en larmes », selon un contemporain.

Claude Lorrain, A Sunset or Landscape with Argus Guarding Io, 1674, huile sur toile
 (Avec l'aimable autorisation de Viscount Coke and the Trustees of the Holkham Estate /  Bridgeman Art Library, Londres)

"Claude a été le premier artiste à placer le soleil directement au centre de l'oeuvre", relève Susan Foister, commissaire de l'exposition. La lumière, les ciels et l’eau de Turner inspirent Turner. Il « nimbe ses paysages anglais de la lumière d’Italie des toiles de Claude », explique-t-elle.

Turner ne fera lui-même le voyage en Italie que bien plus tard, en 1819. C'est presque un pèlerinage, tant il prend soin de mettre ses pas dans ceux de son maître.

Comment l'élève a dépassé le maître
Il n’oubliera pas sa dette envers le maître français : quand il lègue ses œuvres à la National Gallery, il stipule que deux de ses tableaux doivent impérativement être exposés entre deux toiles de Claude Lorrain, « L’Embarquement de la reine de Saba » et « Le Mariage d’Isaac et Rebecca ».

Joseph Mallord William Turner, Keelmen Heaving in Coals by Night, 1835, huile sur toile
 (Image courtesy of the Board of Trustees, National Gallery of Art, Washington DC, Widener Collection 1942.9.86)

L’exposition londonienne se concentre sur les thèmes inspirés du Lorrain qui ont traversé l’œuvre de Turner. Les scènes marines du peintre français, notamment ses scènes portuaires, ont trouvé un écho chez l’artiste britannique qui s’éveille à l’Angleterre industrielle. Dans le magnifique « Keelmen Heaving in Coals by Night », des marins déchargent le charbon la nuit, à la lumière d’immenses torches. La lune a pris la place du soleil au centre de la toile.

L’exposition montre comment l’élève a dépassé le maître, poussant toujours plus loin le rendu de la lumière, des vibrations de l’air et des reflets dans l’eau. Le classicisme du Lorrain s’efface et les fondus lumineux de Turner ne doivent bientôt plus grand-chose au paysagiste français.

Turner Inspired : In the Light of Claude, National Gallery, Londres, du 14 mars au 5 juin 2012

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