Jordaens : un grand peintre flamand au Petit Palais
Fils d’un marchand de drap, Jacques Jordaens (1593-1678) a vécu à Anvers à une époque de déclin de la ville, alors qu’elle avait été au XVIe siècle une place commerciale et financière majeure, les marchandises y affluant du monde entier. Elle reste toutefois une ville d’art et les congrégations catholiques, qui ont repris le dessus sur la réforme, multiplient les commandes.
Jordaens a largement profité de ce contexte et se retrouve entre les années 1620 et les années 1660 à la tête d’un des ateliers les plus rentables d’Anvers.
Jacques Jordaens n’a jamais quitté Anvers, jamais fait le voyage en Italie. Sa peinture est pourtant marquée par l’art italien, les peintres de la Renaissance vénitienne et le caravagisme.
Scènes de fêtes et proverbes
L’exposition se veut didactique : des cartels détaillés racontent les thèmes abordés, une salle explique la technique de la peinture à l’huile et un atelier de dessin est proposé certains jours.
Elle présente d’abord le peintre dans le cadre anversois, avec des représentations d’un cabinet d’art et d’un repas d’artistes. Jordaens, il n’a même pas trente ans, se représente avec sa femme et sa fille, en pied et avec une servante, comme les nobles étaient peints à l’époque.
Certes, Jordaens est le peintre de scènes truculentes, où il se représente souvent, ainsi que les membres de sa famille. Dans le célèbre "Le roi boit", scène d’Epiphanie qu’il a déclinée en plusieurs versions, il est lui-même en train de vomir au premier plan. Il aime aussi illustrer des proverbes : "Comment les vieux ont chanté, ainsi les jeunes jouent de la flûte" réunit plusieurs générations dans un joyeux tableau, pour attirer l’attention des parents sur l’exemple qu’ils donnent à leurs enfants. Il y joue lui-même de la cornemuse.
Des œuvres religieuses influencées par le Caravage
Mais Jordaens est également un grand peintre religieux, et ce sont ses œuvres religieuses que l’exposition propose en premier, comme pour aller à l’encontre des idées reçues sur le peintre. Converti au protestantisme, il travaille toujours pour l’église catholique. Alliant l’influence du Caravage et l’esthétique de la contre-réforme, il montre des figures simples, susceptibles d’émouvoir le fidèle : des personnages pieds nus au pied d’un grand "Christ en croix" d’autel (1620), une "Sainte Famille" pour lequel sa femme et sa fille Elisabeth ont servi de modèles. L’Enfant est débordant de vie et de réalisme, seul un collier de corail évoque le sang du Christ.
Jordaens fait de petites études de têtes sur le vif, variant les attitudes et les expressions, parfois sur la même toile. Il les replace après dans de grandes compositions. Un visage féminin, tordu par la douleur, sera plus tard celui d’une "Mater dolorosa". La figure burinée d’Abraham de Graef, commis de la guilde de Saint-Luc, devient celle d’un des "Quatre évangélistes". Le peintre aime particulièrement les vaches, qui font aussi l’objet d’études.
Une section est d’ailleurs consacrée aux très beaux dessins et études préparatoires.
Des scènes mythologiques peuplées de vaches
Enfin, Jordaens est également peintre d’histoire et de scènes mythologiques, qu’il revisite de façon assez personnelle, dans un festival de chairs marquées par l’influence des maîtres de le Renaissance vénitienne.
Il donne libre cours à son goût pour les bovins dans un "Enlèvement d’Europe" peuplé de nus féminins… et de vaches.
Des vaches, encore, dans "Mercure et Argus", inspiré d’Ovide, où Jupiter à transformé Io, la jeune nymphe dont il est épris, en génisse blanche pour la soustraire à la jalousie de Junon. Mercure, serviteur des amours de Jupiter, apparaît sous les traits d’un jeune vagabond en chapeau de paille aux pieds sales très caravagesque.
Jordaens 1593-1678, La gloire d’Anvers, Petit Palais, avenue Winston Churchill, Paris 8e
Du mardi au dimanche, 10h-18h, nocturne le jeudi jusqu’à 20h, fermé le lundi et les jours fériés
Tarifs : 11€ / 8€ / 5,50€, gratuit jusqu’à 13 ans inclus
Jusqu’au 19 janvier 2014
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