Le musée d'art moderne d'Istanbul fait ses cartons avant de réinvestir dans 3 ans un batiment neuf
Depuis son ouverture fin 2004, ce musée est devenu un symbole de l'Istanbul du 21e siècle, ancienne capitale de l'empire ottoman fière de son passé et ouverte sur le monde. Evoquant en 2005 le succès de cette nouvelle place de l'art contemporain, le magazine Newsweek n'avait pas hésité à qualifier Istanbul d'"une des villes les plus cools" du monde. La reine Elizabeth II s'était rendue à l'Istanbul Modern lors d'une visite d'Etat en mai 2008.
Le nouveau musée doit être dessiné par l'architecte italien Renzo Piano, qui a participé à la conception à Paris du Centre Pompidou et de la nouvelle Cité judiciaire ou encore du gratte-ciel The Shard à Londres.
"Mélancolie et nostalgie"
"Nous ressentons une sorte de mélancolie et de nostalgie" à quitter le bâtiment historique, a expliqué le directeur de l'Istanbul Modern, Levent Calikoglu, tandis que des employés s'affairent à décrocher les oeuvres. "Mais un nouvel avenir est devant nous (...) Notre nouveau bâtiment apportera une nouvelle visibilité au monde artistique et à Istanbul", ajoute-t-il.L'ouverture de l'Istanbul Modern avait été soutenue par le président Recep Tayyip Erdogan, alors Premier ministre. Pour certains, l'existence même du musée était la preuve que les arts pouvaient prospérer dans la Turquie d'Erdogan, dont le parti islamo-conservateur est arrivé au pouvoir en 2002. Depuis, les arts ont connu des périodes difficiles en Turquie mais l'Istanbul Modern revendique 7 millions de visiteurs depuis son inauguration. Des Turcs de tous âges et tous horizons le fréquentent aux côtés des touristes étrangers. Certains visiteurs s'arrêtent devant une immense toile de l'artiste allemand Anselm Kiefer, d'autres s'émerveillent devant un chef-d'oeuvre abstrait de l'artiste turque Fahrelnissa Zeid ou restent bouche bée devant les photographies en noir et blanc d'Ara Güler, représentant le vieux Istanbul.
"Penser à 500 ans"
Le nouveau musée est principalement financé par le sponsor fondateur de l'Istanbul Modern, le groupe Eczacibasi, qui soutient des projets liés aux arts, et par le conglomérat Dogus Group-Bilgili Holding. L'Etat, lui, ne s'implique pas financièrement, comme souvent en matière d'arts en Turquie.Dans sa version future, le musée disposera d'un espace dédié au sein d'un concept plus vaste de réaménagement et de revitalisation du port historique d'Istanbul, le Galataport. Ce projet global d'une valeur de plus d'un milliard de dollars vise à créer des espaces de bureaux et d'habitations ainsi qu'un terminal maritime rénové. L'intégration du musée d'art moderne dans Galataport suscite un enthousiasme mitigé. Des architectes, dénoncent une violation des règles de planification - ce que les concepteurs du projet récusent, d'autres craignent que le musée, dilué dans un plus grand ensemble, y perde son identité.
Dans un entretien avec le quotidien Hürriyet, Oya Eczacibasi, présidente du conseil d'administration de l'Istanbul Modern, s'est voulue rassurante : Galataport "apportera beaucoup à Istanbul" une fois terminé, et la direction de l'Istanbul Modern gardera entièrement la main sur son programme, a-t-elle affirmé. Dès le départ, certains doutaient du besoin d'une institution de type occidental accueillant des expositions temporaires, un cinéma et un restaurant, souligne Mme Eczacibasi. Mais les sceptiques ont été convaincus, avec "beaucoup de soutien des secteurs public et privé", relève-t-elle.
On ne sait pas encore à quoi ressemblera le futur musée mais Mme Eczacibasi l'assure, l'Istanbul Modern dans sa nouvelle mouture deviendra l'un des symboles de la ville, au même titre que ses bâtiments historiques. Et un musée durable: Renzo Piano "vise les 500 ans de vie pour ce bâtiment".
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