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"De Rembrandt au selfie", une histoire de l'autoportrait à Lyon

"Autoprortraits, de Rembrandt au selfie " c'est l'exposition événement du Musée des Beaux-Arts de Lyon. Plus de 130 oeuvres sont rassemblées pour évoquer les différentes approches de l'autoportrait depuis le 16e siècle. De Rembrandt à Ai Weï Weï, l'autoportrait puis le selfie en disent beaucoup sur chaque époque.
Article rédigé par Jean-Michel Ogier
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
"La lapidation de Saint-Etienne" contient le premier autoportrait de Rembrandt (en haut à gauche)
 (France 3 / Culturebox)

Le selfie est devenu un phénomène de société, mais il n'est jamais que l'avatar numérique de l'autoportrait tel que Rembrandt a pu le pratiquer. L'exposition au Musée des Beaux-Arts lyonnais le démontre au travers de 130 oeuvres : peintures, dessins, estampes, photographies, sculptures et vidéos rassemblées grâce à un partenariat entre la Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe, les National Galleries of Scotland à Edimbourg et le musée des Beaux-Arts de Lyon. 

France 3 Lyon nous propose cette semaine d'entrer dans l'exposition événement.

Une série réalisée par : O. Denoyelle  / L. Crozat / X. Dang / A. Saboureau

Episode 1 : le premier "selfie" de Rembrandt

1962. Un historien de l'art est en train d'inventorier les réserves du Musée des Beaux-Arts  quand il découvre un tableau de Rembrandt tombé dans l'oubli : "La lapidation de Saint-Etienne". Rembrandt a peint cette toile en 1625 à lâge de 19 ans. Et dans cette oeuvre de jeunesse qui ne ressemble à aucune autre du maître néerlandais, on remarque un visage: celui du peintre au milieu de la foule vociférante. "Il est anxieux, comme témoin de l'événement qui provient de l'histoire chrétienne, décrypte Michael Clarke, directeur de la Scottish National Gallery". "C'est une forme de signature de Rembrandt.

Certains spécialistes voient dans ce tableau une sorte de manifeste en faveur d'un courant religieux protestant, Les Remontrants. Rembrandt par ce premier autotportrait d'une longue série aurait signé son adhésion à ce courant religieux.

Episode 2 : Cherchez Watteau!

Jean-Antoine Watteau peint les "Fêtes vénitiennes" vers 1718-1719. C'est la seule fois qu'il met en scène des personnages réels précise Michaël Clarke le directeur de la Scottish National Gallery. Petit indice, Watteau se fait musicien dans cette oeuvre. Au centre de l'oeuvre une belle femme richement vêtue. Elle semble l'objet de convoitise entre un ami peintre de Watteau à gauche du tableau et Watteau lui-même. Le nom de "Fêtes vénitiennes" a été donné au tableau après la mort de Watteau en référence à l'opéra-ballet éponyme d'André Campra, très en vogue à cette époque

Episode 3 : Louis Janmot l'autoportrait de l'affiche

Louis Janmot peintre lyonnais réalise son autoportrait en 1832?. Il a 18 ans. Ce qui surprend dans ce tableau c'est d'abord le regard de l'artiste, puissant, déterminé. "A cette époque, explique Stéphane Paccoud le conservateur du musée des Beaux-Arts, les artistes s'attachent à traduire l'idée du génie créateur...Il semble prêt, comme un boxeur à entrer sur le ring".
Autre élémen marquant de ce tableau, Jeanmot est vêtu d'un habit médiéval assezn étonnant. Les spécialistes n'ont pas d'explication particulière.
Cet autoportrait permet à Louis Janmot de gagner un concours et d'intégrer l'atelier d'une "star" de l'époque : Ingres. Mais c'est à Lyon qu'il va passer l'essentiel de son temps. Il sera marqué par la forte présence catholique dans la capitale des Gaules "mais hors des canons de la peinture religieuse telle qu'on la conçoit à l'époque "précise Stéphane Paccoud.
La meilleure preuve: "Le poème de l'âme" un ensemble de tableaux qui fait la fierté du Musée des Beaux-Arts

Episode 4 : de modèle à reporter de guerre le destin extraordinaire de Lee Miller

Parmi les autoprortraits de l'exposition le regard est attiré soudain par...une photo en noir et blanc. C'est l'autoportrait de Lee Miller réalisé en 1932. Un cliché inspiré d'une photo publicitaire  réalisée par la photographe américaine pour vanter la beauté d'un serre-tête. La photo originale est en plan large. 
Etonnant destin que celui de Lee Miller. D'abord modèle pour de grands magazines de mode américains, elle traverse l'Atlantique pour venir vivre à Paris. Là, elle rencontre les Surréalistes et va jusqu'à jouer le rôle d'une statue dans le film de Jean Cocteau "Le sang d'un poète". Puis elle devient reporter de guerre. Elle photographie les joies de la Libération et l'innomable  des camps de concentration. Elle va aussi pénétrer dans le repaire d'Hitler et se prendre en photo dans sa baignoire. Un destin qui fascine Sylvie Ramond la directrice du musée des Beaux-Arts de Lyon : "C'était une femme artiste, une femme libre, indépendante qui impose son image. C'était aussi une femme engagée par toute son activité photographique".

Episode 5 : avec Ai Weï Weï le selfie devient oeuvre d'art

Ai Weï Weï est connu dans le monde entier pour son regard corrosif et virulent sur le pouvoir en place dans le pays qui l'a vu naître: la Chine. Un regard qui lui a valu dêtre arrêté à Chengdu en 2009. Il vient juste d'être appréhendé par les policiers. Dans l'ascenseur où ils sont réunis, l'artyiste a le réflexe desortir son téléphone portable et d'immortaliser la scène en se photographiant dans le miroir. Pia Müller-Tamm directrice du Staaliche Kunsthalle de Karlsruhe voit le flash qui éclabousse l'image comme "une lumière sacrée au-dessus de sa tête. Son T-shirt est un peu cassé (déchiré), il y a des trous. Ai Weï Weï se présente un peu comme le Christ sur le chemin du Golgotha."
La composition en triangle de l'image est par ailleurs une référence claire à l'histoire de l'art. Une façon de construire les tableaux qui remonte à la Renaissance. L'artiste a ce réflexe étonnant de prendre un selfie de cette scène et de le porter immédiatement à la connaissance du monde grâce à internet. Ai Weï Weï est aussi un grand communicant. Son compte Twitter avec 300 000 abonnés est un des plus consultés au monde



  (DR)

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