A Perfect Day, un jour comme un autre
L’HISTOIRE
Un groupe d’humanitaires est en mission dans une zone en guerre : Sophie (Mélanie Thierry), nouvelle recrue, veut absolument aider ; Mambrú (Benicio del Toro), désabusé, veut juste rentrer chez lui ; Katya (Olga Kurylenko), voulait Mambrú ; Damir (Fedja Štukan) veut que le conflit se termine ; et B (Tim Robbins) ne sait pas ce qu’il veut.
Humour, drame, émotion, routine, danger et espoir se conjuguent dans A PERFECT DAY.
NOTE D’INTENTION DU RÉALISATEUR
Le film porte sur ceux dont la mission délicate consiste à mettre de l’ordre dans le chaos. Il raconte leurs tentatives quotidiennes pour mener une guerre à l’intérieur d’une autre – une guerre contre l’irrationnel, contre le découragement. Contre leur désir irrépressible de rentrer chez eux.
L’humour à froid est l’arme du film pour aborder les événements avec distance : piquant, âpre, décapant – désespéré aussi – tout au long du film, souvent en plein cœur de la tragédie. Sûrement parce que c’est dans ces moments qu’il est indispensable.
Le film s’attache à la routine de ceux qui travaillent là où rien n’est routinier. Il évoque les forces et les faiblesses de ces travailleurs, leurs erreurs, leurs décisions, leurs petits malheurs. Sans jamais perdre de vue que l’héroïsme est lié à l’effort consenti plus qu’aux seuls actes.
Le film se déroule dans une région montagneuse, véritable microcosme où tous ceux qui participent à la guerre, de près ou de loin, sont réunis : soldats, civils, Casques bleus, journalistes… Dans ce contexte, un groupe d’humanitaires tente de remonter un cadavre d’un puits, jeté là pour contaminer l’eau – déclaration primaire, mais efficace, d’une guerre biologique.
Un problème a priori facile à résoudre. Mais la première victime de tout conflit armé est le bon sens. Ce qui explique peut-être le fait qu’ils effectuent des allers-retours en voiture sur ces étroites et labyrinthiques routes de montagne, à la recherche d’une issue qui n’existe sans doute pas…
Un labyrinthe à ciel ouvert, écrasé par le soleil, sous le ciel infini des Balkans : étouffant de grandeur. Depuis le début de l’écriture du scénario, j’ai cette vision en plongée des deux 4x4 parcourant sans but ces routes de montagne.
©Fernando León de Aranoa
Dans le cadre de la réalisation de mes précédents films, j’ai souvent eu l’occasion de travailler aux côtés d’humanitaires dans des pays en guerre. La première fois, c’était en février 1995 pendant la guerre de Bosnie. Nous les avions filmés avec deux Betacams, couvrant ainsi le conflit. Nous avions ramené plusieurs dizaines de cassettes et quelques mots – peu – que nous utilisions fréquemment pour évoquer la guerre : désorientation, irrationnel, Babel, labyrinthe, impuissance.
Il y a quelques années, j’ai tourné un documentaire dans le nord de l’Ouganda avec des membres de Médecins sans Frontières. Dans ce qu’on peut appeler un bar, situé à une quinzaine de kilomètres de la frontière soudanaise, alors qu’on buvait une bière Nile Special tiède, j’ai entendu notre responsable de la sécurité évoquer le roman de Paula Farias, Dejarse llover, pour la première fois.
Paula est médecin, coordinatrice d’urgences pour MSF, et écrivain. D’une certaine manière, elle a deux façons d’aider les autres. J’ai été fasciné par la simplicité de l’intrigue de son roman, et par sa profondeur. Il dépeint avec un humour absurde la cruauté de la guerre. C’est dans ces pages, et dans mes propres souvenirs de cette montagne sinueuse et impénétrable au coeur des Balkans, que j’ai puisé l’idée du film.
Loin des scénarios habituels du genre, le film s’attache à une autre guerre, une guerre silencieuse, qui va au-delà des lignes de front et des accords de paix. Une guerre qui se prolonge avec les mines antipersonnel et les enfants armés aux postes de contrôle militaires. Une guerre qui continue avec la haine de l’autre, avec la peur d’une mère, plus forte que n’importe quelle peur.
©Fernando León de Aranoa
NOTES DE PRODUCTION
LE TON
Comme la guerre elle-même, le film fait ressortir l’absurdité et la part d’irrationnel de l’être humain. La première victime de tout conflit armé est la raison. C’est pour cela que l’irrationnel est sans doute le plus redoutable ennemi de notre film. L’humour est inhérent au drame, et je ne peux pas imaginer l’un sans l’autre. Ils se complètent, comme s’il s’agissait des deux faces de la même pièce de monnaie.
LE TRAVAIL DES HUMANITAIRES
Peu de films mettent en scène les humanitaires. Leur importance sociale est inversement proportionnelle à leur présence dans les œuvres de fiction. Quand je les ai accompagnés au cours de leurs missions, que j’ai été témoin de leur travail au jour le jour, difficile et si peu routinier, je me suis dit qu’il fallait raconter leur histoire.
Je ne voulais pas évoquer uniquement la dimension spectaculaire de leur métier, les moments dits héroïques parce qu’ils sauvent des vies. Je souhaitais montrer leur quotidien. Car pour moi, l’héroïsme consiste en premier lieu à assurer une présence sur place et tenter de faire de son mieux.
LE TOURNAGE
Nous avons tourné en altitude, dans une région montagneuse, difficile d’accès. C’était un tournage très exigeant sur le plan physique pour chacun, techniciens et comédiens. Mais leurs efforts à tous se voient à l’écran : le travail humanitaire n’a rien de confortable. Le climat est extrêmement changeant en altitude, ce qui a rendu notre tâche plus difficile encore. Mais nous avions une équipe formidable, presque entièrement composée de techniciens espagnols, déterminés à donner le meilleur d’eux-mêmes. Leur professionnalisme et leur talent sont palpables de bout en bout.
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