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"30 livres pour votre été", un numéro du magazine Lire

Une sélection de 30 livres incontournables pour accompagner votre été.
Article rédigé par franceinfo
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L’édito de Julien Bisson

 

« L’édition ne se contente pas de raconter de belles histoires. Elle sait aussi en produire. Connaissez-vous par exemple les éditions Brouette? Non? Ce n’est pas grave, votre serviteur ignorait aussi leur existence il y a peu encore. Il faut dire que leur naissance est toute récente : il y a moins d’un an, Bernard Prou les portait sur les fonts baptismaux pour autoéditer un premier roman au titre enlevé, Alexis Vassilkov ou la Vie tumultueuse du fils de Maupassant. Soit les péripéties de l’enfant tardif du romancier français et de la peintre russe Lioubov Andréievna Vassilkova, qui connaîtra la Russie révolutionnaire, deviendra le médecin attitré de Staline, avant d’être envoyé au goulag, initié à la franc-maçonnerie, pour finalement rejoindre le maquis et les rangs de la Résistance française. Un destin extraordinaire, strogoffien en diable, porté par un souffle romanesque et le grand vent de l’Histoire : le cocktail avait de quoi séduire tous les éditeurs.

 

Et pourtant… Bernard Prou a vu son manuscrit refusé partout où il l’a présenté. Cet ancien professeur de maths et de physique a donc choisi la longue marche de l’autopublication.

Son bâton de pèlerin à la main, il a fait la tournée des librairies de France et de Navarre pour présenter son œuvre, jusqu’à être remarqué par la très active Griffe Noire de Saint-Maur. Résultat : des commandes qui affluent à son domicile, une chambre transformée en annexe de la poste, et quelque six mille exemplaires écoulés en quatre mois ! De quoi attirer l’attention du Livre de Poche, qui vient de publier en petit format ce roman savoureux, enfin accessible à tous. Histoire, pourquoi pas, d’en faire l’un des best-sellers de l’été ? La belle aventure mériterait en tout cas pareil dénouement.

 

Les best-sellers, il en est justement question dans ce numéro au fil d’une enquête qui s’interroge sur la fabrique du succès. Peut-on prévoir qu’un livre se vendra ? Est-il possible d’anticiper la bonne formule qui séduira le public ? Si les ingrédients sont connus, la recette est incertaine, et la critique souvent assassine.

Avec son franc-parler habituel, Céline affirmait ainsi qu’« un succès est toujours de très mauvaise qualité ». A voir… Il existe bien sûr une littérature commerciale, obéissant à une logique quasi industrielle : agenda réglé des parutions, opérations marketing d’envergure, respect d’un cahier des charges narratif confinant parfois, hélas, à l’accumulation de clichés. Mais l’existence même de cette littérature n’est pas une mauvaise nouvelle en soi. N’en déplaise à Laurence Parisot, un écrivain à succès fait travailler bien plus de gens que sa seule personne. Et une grande partie du monde du livre vit, sans trop vouloir se l’avouer, grâce à ces gros vendeurs si souvent dénigrés. Le risque de la course aux best-sellers, aujourd’hui, est ailleurs. Il est dans la paupérisation des auteurs qui n’ont pas le privilège des têtes de gondole. Il est dans le rétrécissement de l’offre littéraire et la précarisation des petits éditeurs. C’est un risque.

Ce n’est pas une fatalité. Ce début d’année est d’ailleurs là pour nous le rappeler. Qui aurait parié au 1er janvier sur la bonne fortune des premiers romans d’Olivier Bourdeaut et de Catherine Poulain ? Qui avait vu venir le triomphe de l’invisible Elena Ferrante ? Aussi surprenants que mérités, ces cartons éditoriaux restent pour moi la meilleure nouvelle de l’année.

 

 

Avec l’été vient aussi le basculement vers l’automne littéraire et sa grand-messe annuelle. Déjà, les rumeurs bruissent dans les couloirs de l’édition, et les spéculations vont bon train. Quels seront les best-sellers de la rentrée ? On n’ira pas jusqu’à jouer les

Madame Soleil – la météo de juin a fini de nous en dissuader –, mais on miserait bien quelques pièces sur les textes dont nous vous proposons, en exclusivité, les premiers extraits. Vous y trouverez des valeurs sûres, une poignée de prétendants ambitieux, des (bonnes) surprises, et même un premier roman dont on n’a pas fini de parler. Pendant que vous dégusterez ces pages, nous n’aurons pas trop des prochaines semaines pour achever de passer la rentrée au tamis, afin de n’en garder que le meilleur. Mais cessons là, on aura bien le temps de vous en parler dès la mi-août.

 

D’ici là, très bel été à tous ! »

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Pour plus d’information : www.lexpress.fr

 

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