Loup abattu dans les Hautes-Alpes : ce que dit la loi sur les tirs visant à protéger les troupeaux des éleveurs
Le "prélèvement" d'un loup dans les Hautes-Alpes dimanche 5 juillet a relancé la polémique sur les procédures autorisées ou non pour protéger les troupeaux contre les prédateurs.
L'été commence et les alpages sont secoués par une polémique entre les défenseurs des loups et les éleveurs. Dans une vidéo publiée mercredi 8 juillet 2020, le journaliste Hugo Clément est revenu sur un événement survenu dimanche au col du Lautaret, dans les Hautes-Alpes. Dans la nuit, un jeune loup a été abattu par des louvetiers, après s'être approché d'un troupeau de moutons. Ce dernier était protégé par des chiens et un âne.
Le loup était en train de s'éloigner du troupeau quand il a été touché par le tir mortel. La scène, filmée par un photographe animalier, a suscité de vives réactions, notamment sur les réseaux sociaux. "Les lieutenants de louveterie ont fait l’objet d’insultes diverses et de menaces de mort qui les ont conduits à porter plainte", a annoncé la préfecture des Hautes-Alpes dans un communiqué. Un berger a répondu de manière virulente à Hugo Clément dans une vidéo qui comptabilise à présent plus de 900 000 vues. Il y indique notamment que les faits dénoncés sont tout à fait légaux.
La lutte contre la prédation
D'un point de vue juridique, si le loup est une espèce protégée en France, il est possible de l'abattre dans certaines conditions bien définies. Sa population, estimée à 580 individus adultes en France selon l'Office français de la biodiversité (OFB), croît depuis plusieurs années. Pour le gouvernement, l'objectif est atteint. "Pour la période 2018-2023, le PNA [plan national d’actions sur le loup et les activités d’élevage] fixe l’atteinte du cap des 500 loups présents sur le territoire français à horizon 2023", rappelait le ministère de la Transition écologique en 2019.
Des "prélèvements" sont donc autorisés dans l'objectif de contrôler la population de loups vivant à l'état sauvage, et de limiter sa prédation. Ainsi, les loups attaquent en moyenne près de 12 500 animaux d'élevage par an. Le quota maximum de prélèvement a été revu à la hausse ces dernières années : il est passé de 10% de la population en 2018 à 17% de la population 2019. Ces chiffres peuvent néanmoins être légèrement majorés de 2%, précise le ministère, "en cas de persistance de la pression de la prédation".
En 2019, 98 loups ont été abattus, dont 4 illégalement, décompte le Collectif des associations pour la protection du loup en France. La destruction ou tentative de destruction d'un loup en dehors du cadre réglementaire est punie de deux ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende, selon l'article L415-3 du Code de l’environnement.
Des tirs de défense réalisés à proximité du troupeau
Dans le cadre du plan national d'actions sur le loup et les activités d'élevage (PDF), un "protocole technique d'intervention" est élaboré. Les éleveurs ou personnes mandatées par ceux-ci peuvent réaliser des tirs d'effarouchement si un loup attaque un troupeau. Les tirs mortels sont alors strictement interdits, et seules des munitions non létales sont autorisées. Ce dispositif de prévention ne nécessite pas d'autorisation particulière, mais l'auteur des tirs doit être en possession d'un permis de chasse valide.
Il existe ensuite deux catégories de tirs réalisés avec des armes létales, dits "dérogatoires" car soumis à des autorisations préfectorales. Les premiers, appelés "tirs de défense", ont pour objectif d'empêcher l'attaque immédiate du troupeau par le loup. Ils sont conditionnés à la mise en place de mesures de protection de type clôture électrifiée, et ne peuvent être effectués qu'à proximité immédiate du troupeau protégé. Tout dispositif visant à attirer le loup est interdit.
Des chasseurs volontaires aussi autorisés
En cas d'échec, l'éleveur peut demander une opération de "tir de défense renforcée" réalisée sous le contrôle de lieutenants de louveterie ou d'agents de l'Office français de la biodiversité. Si les mesures préventives sont vaines, des tirs "de prédation" ou "tirs de prélèvement" peuvent être organisés. Il s'agit d'opérations collectives décidées par la préfecture si des dommages importants ont été constatés.
Par ailleurs, "tout participant à une opération de tir doit impérativement être titulaire du permis de chasser valable pour l’année en cours ainsi que d’une assurance de responsabilité civile spécifique à l’utilisation des armes de chasse dans le cadre des opérations dérogatoires qui ne constituent pas un acte de chasse au titre de la réglementation", rappelait en 2019 l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (PDF), organisme intégré depuis le 1er janvier dans l'Office français de la biodiversité.
Les tirs peuvent être effectués par les éleveurs eux-mêmes ou par des personnes qu'ils mandatent. Les brigades des grands prédateurs terrestres et les lieutenants de louveterie, qui sont des bénévoles et assermentés pour une mission de service public, sont également habilités à réaliser ces tirs. Enfin, des chasseurs volontaires peuvent aussi y être autorisés, après avoir suivi une formation obligatoire dispensée par l'Office français de la biodiversité.
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