Amiens : mobilisation des ouvriers Goodyear
Unis par 700 ex-salariés français. Une action commune des anciens du site d'Amiens-Nord qui accusent l'équipementier automobile de les avoir exposé sciemment à des produits toxiques sans protection adéquate.
Les ouvriers de Goodyear Amiens-Nord mobilisés jour et nuit contre la fermeture de leur usine. L'image a fait la Une de l'actualité pendant des semaines. En janvier dernier, l'entreprise a fermé. 1.200 ouvriers ont perdu leur travail et retrouvé leur anonymat. Aujourd'hui, ils livrent une autre bataille. Moins médiatique. Trouver qu'ils auraient été intoxiqués sciemment par leur entreprise.
On aurait pu nous dire tout ce qu'il y avait de dangereux ici. On ne nous l'a jamais dit.
Nous sommes des centaines à avoir été sacrifiés.
Je ne peux pas dire combien de salariés seront malades dans 10 ans. Je ne peux même pas dire pour moi. On est avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
60 ans de moyenne d'âge, 30 ans de carrière. 700 anciens ouvriers ont décidé de se regrouper pour porter plainte et attaquer la maison mère aux Etats-Unis. Une plainte déposée à Akron dans l'Ohio, siège historique du géant du pneu Première accusation : leur sécurité n'était pas assurée dans l'usine. Les ouvriers disent avoir travaillé au contact de produits chimiques sans protection adaptée. Jean-René Brezin a passé 31 ans au secteur finition. En 2006, il fait une violente réaction allergique à un produit chimique, un eczéma géant. A l'époque, la seule protection que lui fournit son employeur, ce sont des gants en coton.
On mettait ces gants-la. Le produit passait a travers. Au bout de 8 heures, le gant était noir. On aurait dû les changer. Ils étaient mouillés.
8 ans plus tard, il ne peut toujours pas travailler. Ses mains le font souffrir en permanence. A l'époque, rare sont ceux qui ont osé en parler.
Des intérimaires ont eu des problèmes, s'ils disaient quelque chose, on en prenait d'autres. Un ouvrier, c'est pareil.
Autre grief à l'égard de leur employeur. Goodyear ne leur aurait pas clairement indiqué quels produits ils manipulaient. Ils disent ne pas avoir été informé des risques encourus. des rapportssuccessifs deTOîîñS décrivent les dangers de cette industrie. Notamment les risques de cancer liés a l'utilisation de certains produits Huiles aromatiques, noir de carbone, formol, nitrosamine. Même si les taux mesurés dans l'usine ne dépassent pas les seuils autorisés. Ce qui pose problème, c'est l'accumulation des produits. Goodyear aurait bien tenté de les substituer, mais d'après l'une des avocates des salariés, pas assez vite.
Ils pouvaient utiliser des produits de substitution à ces produits dangereux, ils ont fait le choix de ne pas le faire. lls ne coûtaient pas plus cher. Il y a eu une volonté de mal faire.
Aujourd'hui, certains ouvriers sont convaincus que leur maladie est liée aux produits chimiques qu'ils ont respiré et manipulé. C'est le cas de Jean-Claude Villemin, en 2001 ce mécanicien à la retraite a eu un cancer de la gorge. Dans son travail, il était souvent couvert d'huile et de suie.
Quand je mettais ma main dans le noir, y'avait toujours un courant d'air, ça remontait à l'intérieur. Deux jours après je crachais encore du noir.
Est-ce qu'on vous a averti à un moment des risques.
Jamais.
Pourtant, ce médecin du travail a donné l'alerte plusieurs fois. Il a envoyé à la direction une cinquantaine de courriers sur les risques chimiques puis a sollicité l'inspection du travail.
Il n'y a jamais eu de réponse à mes courriers. Mon but n'était pas de faire sauter le directeur. C'était une situation qui durait depuis des années.
Jusqu'à présent, Goodyear garde le silence sur le fond de l'affaire et nous a fait parvenir ce communiqué.
Les 700 ouvriers se lancent dans un long processus judiciaire. La première audience devrait avoir lieu d'ici la fin de l'été aux Etats-Unis.
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