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Trois questions sur la prothèse vaginale visée par des plaintes dans le monde entier

Le Prolift est un dispositif médical, installé dans le vagin, utilisé pour traiter les descentes d'organes. Mais il est accusé de provoquer de graves douleurs, des inflammations et des nécroses chez les femmes.

Article rédigé par franceinfo
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Le Prolift, une prothèse vaginale utilisée pour traiter les descentes d'organes, est accusé de provoquer de graves complications. (NATASHA ALIPOUR FARIDANI / DIGITAL VISION / GETTY IMAGES)

Quelque 800 Australiennes ont entamé un recours collectif contre le laboratoire américain Johnson & Johnson, fabriquant d'une prothèse vaginale contestée, rapporte L'Obs, mercredi 18 octobre. Le Prolift est un dispositif médical, installé dans le vagin, utilisé pour traiter les descentes d'organes. Mais il est accusé de provoquer de graves douleurs, des inflammations et des nécroses chez les femmes. Franceinfo répond à trois questions sur cette affaire.

Qu'est-ce que la prothèse Prolift ?

Avec l'âge ou après un accouchement difficile, certaines femmes peuvent souffrir d'une descente d'un ou plusieurs organes (vessie, utérus ou rectum). Pour traiter cette pathologie, des médecins français ont inventé un nouveau dispositif médical dans les années 2000. Le Prolift est une prothèse en plastique, qui ressemble à une sorte de filet, précise L'Obs. Il est inséré par voie vaginale et accroché à deux ligaments afin de permettre de soutenir les organes.

La prothèse a été commercialisée par Johnson & Johnson en 2005. Trois ans plus tard, elle avait déjà été posée à au moins 100 000 femmes, selon la revue Pelvimag. Des chiffres anciens qui sont donc vraisemblablement très en-deçà de la réalité. Le Prolift a, en outre, été mis sur le marché dans de nombreux pays : les Etats-Unis et l'Australie, mais aussi le Royaume-Uni, les Pays-Bas ou encore plusieurs pays d'Amérique du Sud.

Pourquoi pose-t-elle problème ?

Le Prolift a rapidement causé de vives douleurs à de nombreuses patientes  pendant des rapports sexuels, ce dont ces femmes n'avaient pas été averties avant la pose. Elles affirment que la prothèse leur "cisaille le vagin" et fait l'effet d'une "râpe à fromage" ou de "papier de verre", rapporte L'Obs. En cause, le matériau utilisé, trop lourd, qui tire sur les terminaisons nerveuses. Le Prolift "entraîne des défauts de cicatrisation et une réaction inflammatoire à l'intérieur du vagin", poursuit l'hebdomadaire.

La prothèse peut également entraîner de graves complications : perforation de la vessie ou du rectum, apparition d'une boule dans le vagin ou, dans les cas les plus extrêmes, nécrose des parois vaginales. Une Australienne a ainsi souffert d'une nécrose, accompagnée de violentes douleurs et de bleus sur ses fesses et ses cuisses, rapporte L'ExpressIl lui a fallu 14 opérations chirurgicales, réparties sur dix ans, pour enfin pouvoir enlever la prothèse. Le Prolift peut en effet devenir pratiquement impossible à retirer aux patientes, selon l'agence américaine du médicament citée par la BBC (en anglais).

Au-delà du matériau inadapté et du manque d'information des patientes sur les risques encourus, ce sont les chirurgiens qui sont incriminés. La pose du Prolift, très technique, devait à l'origine être effectuée par des spécialistes formés. "Mais le service marketing de Johnson & Johnson se tourne, lui, vers des chirurgiens non-expérimentés", selon L'Express. "Aux Etats-Unis, je crois vraiment qu’il y a des gens qui ont fait un petit peu n’importe quoi, admet Bernard Jacquelin, l'un des créateurs de la prothèse, interrogé par L'Obs. En Amérique du Sud, il paraît que ça a été encore pire, mais ils ne portent pas plainte, donc on n'en entend pas parler."

Où en sont les poursuites judiciaires ?

Des dizaines de milliers de plaintes ont été déposées contre Johnson & Johnson aux Etats-Unis, par des femmes souffrant de complications à cause de cette prothèse. Linda Gross, une infirmière du Dakota, a obtenu 11 millions de dollars (9,3 millions d'euros) de dommages et intérêts de la part du fabricant en 2012, après avoir subi 18 opérations pour retirer le Prolift. Une autre Américaine, Sharon Beltz, a obtenu 2 millions de dollars (1,7 million d'euros), précise L'Obs.

Des plaintes ont également été déposées aux Pays-Bas, en Australie et Royaume-Uni. La ministre de la Santé écossaise a même présenté ses excuses aux "survivantes de la prothèse", en 2015, après avoir lu les témoignages des victimes de ce scandale sanitaire, rapporte la BBC (en anglais). 

Le Prolift a en outre été interdit en 2012 aux Etats-Unis, puis en 2013 en France. Mais des versions plus légères de ce dispositif médical sont toujours posées à des femmes souffrant de descente d'organes, indique L'Obs. "On les utilise en dernier recours sur des patientes ayant des indications spécifiques, précise l'hebdomadaire. Pour ces patientes, ne pouvant pas être opérées par 'voie haute' (cœlioscopique) ou ayant fait plusieurs récidives, elles sont salutaires."

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