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Salaires des infirmiers, nombre de lits, niveau de la dette... Neuf graphiques pour comprendre la situation des hôpitaux

Article rédigé par Robin Prudent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Un panneau indiquant le service des urgences de l'hôpital de Nantes, en avril 2019. (LOIC VENANCE / AFP)

Des milliers de professionnels de santé, tous métiers confondus, dénoncent les conditions de travail dans l'hôpital public. Le gouvernement a promis de nouvelles mesures mercredi.

L'hôpital public craque de toutes parts. C'est le message que tentent d'envoyer les professionnels de santé au gouvernement depuis plusieurs mois. Jeudi 14 novembre, ils étaient des milliers de médecins, infirmiers, aides-soignants et internes des hôpitaux publics à défiler partout en France, dont 10 000 à Paris, pour dénoncer leurs conditions de travail et réclamer un "plan d'urgence". Face à ce mouvement inédit, Edouard Philippe a promis de nouvelles mesures, dès le 20 novembre. Franceinfo vous résume la situation compliquée de l'hôpital public en infographies.

1La fréquentation des urgences a doublé en 20 ans

Des services d'urgence pleins à craquer. Et pour cause : le nombre annuel de passages progresse chaque année de 3,5% en moyenne. Au total, les structures publiques et privées ont accueilli 21 millions de patients en 2016, contre 10,1 millions en 1996, selon les données de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Cette évolution est liée à de nombreux facteurs, comme la suppression de lits dans d'autres services, allongeant ainsi l'attente des patients aux urgences avant une hospitalisation, ou le nombre insuffisant de médecins généralistes dans certaines zones.

2Des lits sont supprimés année après année

Les fermetures de lits d'hospitalisation complète (avec au moins une nuit à l'hôpital) se poursuivent. Leur nombre est même passé sous la barre symbolique des 400 000 : les 3 046 établissements de santé publics et privés disposaient exactement de 399 865 lits en 2017, selon un rapport publié par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). En une vingtaine d'années, 100 000 lits ont ainsi été supprimés, au grand dam des urgentistes qui dénoncent le manque de débouchés pour hospitaliser leurs patients. La perte de capacité d'accueil des hôpitaux a été très partiellement compensée par des créations de places d'hospitalisation partielle (sans nuitée) : 800 ont été ouvertes en 2017, portant le total à près de 75 500.

3L'hôpital de jour est privilégié

Depuis quelques années, l'hôpital français a pris le "virage ambulatoire", c'est-à-dire une prise en charge médicale sans hospitalisation complète. Ce mouvement s'est traduit par une nouvelle hausse des hospitalisations partielles en 2017 (16,8 millions de journées, soit +2%) et un nouveau tassement des hospitalisations complètes (119,3 millions de journées, soit -0,8%). Une telle progression est possible grâce aux progrès de la médecine, et notamment de la chirurgie qui est de moins en moins invasive. Mais cela correspond aussi à des incitations financières pour les hôpitaux privés ou publics. Une opération réalisée sans nuitée représentera un coût bien moins élevé qu'une hospitalisation complète pour l'établissement.

4Les Allemands ont plus de lits d'hôpitaux par habitants que les Français

Les files d'attente des patients, debout dans les couloirs ou assis sur des sièges, sont devenues des images récurrentes dans les hôpitaux français. En cause, notamment : la diminution du nombre de lits disponibles. Selon la Banque mondiale, la France disposait ainsi de 6,5 lits d'hôpitaux pour 1 000 personnes en 2013. C'est moins qu'en Allemagne (8,3), en Autriche (7,6) ou en Hongrie (7), mais bien plus qu'au Royaume-Uni (2,8), en Espagne (3) ou encore au Portugal (3,4).

5Les infirmiers français sont parmi les moins bien payés

L'augmentation des salaires est l'une des revendications principales des infirmiers en grève dans les hôpitaux. Et pour cause, le salaire de ces professionnels de santé est particulièrement bas, à en croire les comparaisons internationales. Selon l'OCDE, il était même inférieur au salaire moyen français, en 2015... et parmi les plus bas des pays membres. A titre de comparaison, en Espagne, le salaire des infirmiers représente 1,27 fois le salaire moyen du pays, et même 1,79 fois le salaire moyen au Mexique. Face à cette grogne, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a promis fin octobre un "plan de soutien" qui mettra l'accent sur "un meilleur investissement courant" et "la revalorisation des salaires, notamment en début de carrière". Quelques mois auparavant, la prime mensuelle de 100 euros n'avait pas satisfait les professionnels en grève.

6Les arrêts maladie sont plus nombreux que dans d'autres secteurs

Face à la pression et aux conditions de travail, de nombreux personnels de santé ont dû s'absenter de l'hôpital. Ainsi, l'ensemble des employés du secteur hospitalier a déclaré en moyenne 10 jours d'absence pour maladie par an, contre 7,9 en moyenne dans tous les secteurs. Les plus touchés sont les infirmiers et les aides-soignants des hôpitaux publics. "Ces écarts s'expliquent par des différences de conditions de travail, notamment d'exposition aux contraintes physiques, explique la Drees dans un rapport de 2017. Les contraintes psycho-sociales et les exigences émotionnelles en particulier constituent également des déterminants importants de recours aux arrêts maladie."

7Le personnel hospitalier doit faire face à des agressions

Insultes, injures, menaces, violences... Les professionnels de santé doivent faire face à de nombreuses atteintes aux personnes dans le cadre de leur travail. Dans son rapport 2019 (PDF), l'Observatoire national des violences en milieu de santé a ainsi comptabilisé 20 330 signalements d'atteintes aux personnes sur l'année 2018. Dans le détail, ce sont les services de psychiatrie et des urgences qui sont les plus concernés. "Le monde de la santé n'échappe pas à un fait de société qui touche en réalité toute profession rendant un service à nos concitoyens et que les professionnels de santé traduisent souvent en des termes qui leurs sont typiques : l''intolérance à la frustration'. Cette 'frustration' se traduit par une réaction plus ou moins violente à une contrariété que la personne ne peut pas supporter sur fond d'impatience dans un contexte culturel individualiste, de la satisfaction immédiate et du 'J'y ai droit'", explique l'Observatoire national des violences en milieu de santé.

8La France est dans la moyenne en nombre d'infirmiers et de médecins

Depuis de longues années, l'hôpital français cherche (désespérément) des médecins. Ces établissements peinent désormais à recruter ou fidéliser les infirmières au point parfois de fermer des lits pourtant financés. Et le problème ne semble pas cantonné à l'Ile-de-France : presque tous les établissements ayant répondu à l'enquête de la Fédération hospitalière de France, publiée en octobre, font état de difficultés de recrutement. Au sein de l'Union européenne, la France fait partie de la moyenne concernant le nombre de médecins et d'infirmiers pour 1 000 habitants. Mais ce chiffre, issu des rapports de l'OCDE sur la santé, englobe l'ensemble de ces professionnels de santé, et pas seulement ceux du secteur hospitalier, particulièrement affectés par les difficultés de recrutement.

9Les hôpitaux publics français sont très endettés

Les hôpitaux publics sont endettés. Très endettés. En 2017, la dette des 1 000 hôpitaux publics représentait plus de 30 milliards d'euros, soit 42,8% de leur chiffre d'affaires. "Cette dette a augmenté de façon significative depuis le début des années 2000, ce qui s'explique par la recherche d'un maintien de l'investissement dans un contexte de diminution des ressources des hôpitaux, et d'autre part par des plans nationaux d'investissement", explique la Fédération hospitalière de France, à franceinfo. Et cette dette pèse lourd dans les finances de ces établissements. Chaque année, les hôpitaux paient environ 840 millions d'euros de frais d'intérêt sur la dette. De quoi placer cette question au cœur des revendications des professionnels. Dimanche 17 novembre, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, s'est dit "ouvert" à une éventuelle reprise de la dette des hôpitaux, soulignant la "nécessité (...) de leur donner les moyens de fonctionner bien".

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