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Neuf choses que vous ignorez (peut-être) sur Edouard Philippe

Le chef du gouvernement était l'invité de "L'Emission politique", jeudi 28 septembre sur France 2. Franceinfo revient en neuf points sur le parcours du Premier ministre. 

Article rédigé par Elise Lambert
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10 min
Edouard Philippe lors d'un déplacement sur les chantiers navals STX à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), en tant que maire du Havre, le 1er février 2016. (JEAN CLAUDE MOSCHETTI / REA)

Réforme du Code du travailprésentation du budget 2018, plan d'investissement... Depuis la rentrée, Edouard Philippe est sur tous les fronts, multipliant les annonces de réformes. Le Premier ministre, proche d'Alain Juppé et ancien maire du Havre (Seine-Maritime), était l'invité de "L'Emission politique", jeudi 28 septembre sur France 2. 

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Ce rendez-vous médiatique s'annonce important pour le chef du gouvernement, à un moment où 53% des Français se disent mécontents de ses actions, selon un sondage Odoxa Dentsu-Consulting pour franceinfo et Le Figaro, paru jeudi. L'occasion aussi pour le Premier ministre de renforcer sa notoriété auprès du grand public : encore 38% des Français ne connaissent pas précisément son nom, dévoile cette enquête. Pour vous aider à mieux le connaître, franceinfo a listé neuf choses que vous ignorez (peut-être) sur Edouard Philippe. 

Il a fait Sciences Po et l'ENA

Né à Rouen (Seine-Maritime) en 1970, Edouard Philippe est le fils de deux professeurs de français. "Nous [lui et sa sœur] avons reçu une éducation très libre", dit-il dans Le Point en 2010. Après avoir passé son bac à Bonn (Allemagne), où son père avait été muté comme directeur du lycée français de la ville, il fait une année d'hypokhâgne avant d'entrer à Sciences Po pour "trois années de rêve", décrit-il au Point"Faire l'ENA a été moins amusant."

Diplômé de la section "service public" de Sciences Po, il intègre l'ENA en 1995 et sort parmi les quinze premiers du classement final. "C'était un vrai centriste, drôle et sympathique, ami aussi bien avec des gens de gauche que de droite", se souvient un de ses anciens camarades de promo à l'ENA, Julien Carmona, à Challenges. Avant même le début de la formation, Edouard Philippe se rapproche ainsi de Jérôme Guedj, alors assistant parlementaire d'un certain Jean-Luc Mélenchon. "Tu as déjà été admissible, ton profil m’intéresse. On va bosser ensemble", lance le premier au second, selon Le Monde. "Les deux jeunes étudiants topent et se retrouvent à bûcher tout l’été… dans le bureau du Sénat de Jean-Luc Mélenchon", raconte le quotidien.

A sa sortie de l'ENA, en 1997, Edouard Philippe choisit de rejoindre le Conseil d'Etat avant de se lancer en politique, pour participer à "l'histoire en train de se faire", dit-il à l'hebdomadaire.

Il a milité au PS pour Michel Rocard

Pendant sa scolarité à Sciences Po, le jeune Normand milite pendant deux ans pour le PS et pour Michel Rocard, alors Premier ministre de François Mitterrand. "J'avais grandi dans un milieu plutôt à gauche où l'on votait socialiste, et il y avait chez lui un côté social-démocrate assumé qui m'allait bien, confie-t-il au Point, j'aimais ses discours sur l'exigence de réforme."

Mais après l'éviction de Michel Rocard de la tête du PS, il rend sa carte du parti et se rapproche de la droite. "Je n'ai pas été emballé par ce que j'y ai vu [au PS], notamment quand François Mitterrand a décidé d'avoir la peau de son ancien chef de gouvernement."

Il est très proche d'Alain Juppé

Progressivement, Edouard Philippe se rapproche du maire du Havre Antoine Rufenacht (1995-2010), ancien collaborateur de Raymond Barre puis directeur de campagne de Jacques Chirac en 2002. Cette même année, il participe à la création de l'UMP au côté d'Alain Juppé. "Les deux hommes ne se quitteront plus", note Challenges.

Lors d'un entretien de "huit minutes et demie", Alain Juppé explique alors au jeune Edouard Philippe "comment il voulait que ça se passe, comment on allait organiser le parti, quel était le plan, et comment il travaillait avec ses collaborateurs", raconte-t-il au JDD.

En 2004, lorsque Alain Juppé est condamné à 18 mois de prison avec sursis dans l'affaire des emplois fictifs du RPR, Edouard Philippe rejoint le secteur privé. Trois ans plus tard, il intègre le cabinet d'Alain Juppé lorsque ce dernier est nommé ministre de l'Ecologie de François Fillon, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Lorsqu'Alain Juppé quitte son portefeuille en 2008, Edouard Philippe rejoint de nouveau le privé et devient directeur des affaires publiques d'Areva.

Ils ont une très grande confiance réciproque et se ressemblent sur de nombreux points : leur intelligence, leur culture, leur vision de la société.

Aurore Bergé, ancienne membre de l'équipe de campagne d'Alain Juppé

à Challenges

En 2016, il devient l'un des porte-parole d'Alain Juppé à la primaire de la droite. Après la défaite de ce dernier, il soutient François Fillon, avant de se mettre en retrait de la campagne après les révélations sur l'affaire Penelope Fillon.

Il a failli en venir aux mains avec Nicolas Sarkozy en 2002

Le 13 décembre 2014, Edouard Philippe est invité par Laurent Ruquier sur le plateau d'"On n'est pas couché" sur France 2. Après une demi-heure d'interview, Léa Salamé lui pose une question "cash" : "Edouard Philippe, est-ce que c'est vrai que vous en êtes venu aux mains avec Nicolas Sarkozy ?" 

D'abord évasif, l'intéressé répond : "Oui, il y a eu des explications franches... Mais c'était il y a très longtemps." Avant de développer : "Ça s'est passé en 2002. J'avais dû faire quelque chose qui ne plaisait pas complètement à Nicolas Sarkozy, et on s'en est expliqué. Et il est euh... [mimant un geste avec les deux poings] virulent, vif... Et euh, en fait... moi aussi !" Interrompu par Laurent Ruquier, Edouard Philippe ne donnera pas plus de détails sur les raisons de l'altercation.

En 2002, Edouard Philippe est venu aux mains avec Nicolas Sarkozy
En 2002, Edouard Philippe est venu aux mains avec Nicolas Sarkozy En 2002, Edouard Philippe est venu aux mains avec Nicolas Sarkozy

On en apprend finalement davantage dans Le Monde, lundi 15 mai. La scène s'est en fait déroulée le 17 novembre 2002, lors du congrès fondateur de l'UMP. "Alors ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy avait tenté de voler la vedette à Alain Juppé, en arrivant – par surprise – à l’heure du déjeuner. Edouard Philippe l’empêche de faire une entrée triomphale", raconte Le Monde

"Après les premières prises de parole, on me fait dire que le ministre de l’Intérieur veut me voir. Dans la loge, il s’avance vers moi. Il me tape contre le poitrail avec le poing, et lâche : 'Toi, tu ne me refais jamais ça !' Il continue, je repousse son bras, nous sommes tous les deux déséquilibrés. Cela aurait pu déraper… Finalement, il s’est calmé d’un coup et moi, j’étais flageolant", se souvient Edouard Philippe. Qui conclut : "Il est sanguin et moi, je n’aime pas qu’on m’engueule."

Il imite très bien Valéry Giscard d'Estaing 

Invité sur Europe 1 en novembre 2013, Edouard Philippe raconte comment Valéry Giscard d'Estaing lui a fait part de ses doutes lorsqu'est née, en 2002, l'Union pour un mouvement populaire (UMP). "La première fois que j'ai eu l'occasion de rencontrer et de discuter avec Giscard, c'était dans les Landes, à la première université d'été de l'UMP", commence Edouard Philippe. Ce jour-là, Alain Juppé a du retard, et charge son bras droit – alors directeur général de l'UMP – de recevoir l'ancien président de la République.

Sur Europe 1, Edouard Philippe se lance alors dans une imitation assez juste de VGE : 

Il a chroniqué la campagne présidentielle pour "Libération"

A la suite de son retrait de la campagne, le maire du Havre débute des chroniques hebdomadaires pour le quotidien Libération, où il décrit la campagne présidentielle vue de l'intérieur. "Je l’ai regardé dans mon bureau, au Havre. Lundi matin. Tout seul. A 10h25, j’ai allumé la télévision", écrit-il à propos du discours d'Alain Juppé le 6 mars. Ce jour-là, l'ancien Premier ministre confirme qu'il ne sera pas candidat à la présidence de la République après l'annonce de la mise en examen de François Fillon. "Je savais ce qu’il allait dire. Il ne me l’avait pas dit, parce qu’il prévient rarement. J’ai l’habitude."

Le député Les Républicains a aussi publié un premier roman en 2007, L'Heure de vérité (Flammarion), co-écrit avec son ami Gilles Boyer, ancien directeur de cabinet d'Alain Juppé à la mairie de Bordeaux. Au printemps 2011, ils publient ensemble Dans l'ombre (JC Lattès), un roman de politique-fiction dans lequel "les politiques et les apparatchiks vivent ensemble. Ni les uns, ni les autres ne peuvent survivre seuls", note le site de l'éditeur.

Il n'a pas fourni une déclaration de patrimoine complète

Selon Mediapart (édition abonnés), Edouard Philippe aurait écopé d'un blâme de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) pour avoir refusé de fournir certaines informations sur sa déclaration de patrimoine de 2014, pourtant exigées par la loi.

Sur la valeur de ses biens immobiliers, le député du Havre a systématiquement écrit "aucune idée", décrit le site d'investigation. La valeur de son appartement à Paris ? "Aucune idée." Ses parts dans une résidence de Seine-Maritime ? "Aucune idée." Malgré la relance de la HATVP, Edouard Philippe aurait refusé d'estimer la valeur de ses propriétés.

Il ne s'agit cependant pas d'une infraction. Interrogé par Mediapart, le maire du Havre concède : "Comme beaucoup de parlementaires sans doute, j’ai essayé de concilier le respect de la loi et une forme de mauvaise humeur", précisant qu’il n’a omis aucun bien et qu'il a bien indiqué le prix de ses achats. "Je n’avais pas accès aux bases de données qui permettent une évaluation."

Il n'a pas toujours cru en Emmanuel Macron

Le député-maire du Havre n'a pas toujours cru en l'ancien ministre de l'Economie. "Pour gagner la présidentielle, il faut avoir fait le tour de France, jugeait-il en 2016 auprès du JDD. Il y a de la place pour les jeunes, mais l'enracinement, le lien charnel avec le pays, c'est important." En septembre 2016, interrogé par L'Opinion, il lâche : "Il y a deux Macron. Celui des discours – avec lequel je suis souvent d'accord –, et il y a le Macron des actes (...) dont on ne peut pas dire qu’il ait fait des choses considérables." Il faut dire qu'à cette époque, Edouard Philippe est convaincu qu'Alain Juppé peut remporter la primaire de la droite.

Pas plus tard qu'en janvier 2017, dans une chronique publiée dans Libération, Edouard Philippe écrit à propos d'Emmanuel Macron : "Pour certains, impressionnés par son pouvoir de séduction et sa rhétorique réformiste, il serait le fils naturel de Kennedy et de Mendès France. On peut en douter. Le premier avait plus de charisme, le second plus de principes." On a connu plus flatteur. 

Selon plusieurs proches du nouveau président de la République, Emmanuel Macron et Edouard Philippe s'apprécient toutefois beaucoup. "Je l'aime bien, car c'est quelqu'un de sympathique et d'intelligent", confiait le juppéiste en septembre 2016 à L'Opinion. "Je l'aime beaucoup à titre personnel. J'ai de l'estime pour son intelligence", disait-il déjà en février 2015 à propos du ministre de l'Economie, note le JDD"Macron pense à 90% la même chose que moi."

Il est fan du film "Le Parrain", a une peur bleue du dentiste, et aurait aimé être chef d'orchestre

Ces trois détails "intimes" ont un seul point commun : c'est Edouard Philippe lui-même qui les a livrés dans un portrait chinois publié en 2010 dans Le Point. "J'ai des peurs absurdes. Je suis effrayé à l'idée d'aller chez le dentiste. J'ai peur des requins. Du coup, je ne suis pas à l'aise quand je nage dans la mer", confesse-t-il par exemple. 

S'il était un personnage de roman, Edouard Philippe pense à "Cyrano de Bergerac, parce qu'il est le plus français des héros. Il a la manière, le courage, un amour du fond et de la forme." Toujours sur le plan culturel, le maire du Havre évoque sa passion musicale pour Bruce Springsteen, et filmique pour Sean Connery – "un Ecossais formidablement classe. Il est beau jeune, vieux et dans tous ses films" – et pour Le Parrain de Francis Ford Coppola – "Je l'ai vu au moins cinquante fois. C'est juste une tragédie parfaite en trois actes, merveilleusement interprétée et d'une beauté visuelle à couper le souffle."

Une autre réponse prend un sens singulier au regard du destin que l'on prête désormais à Edouard Philippe. Lorsque Le Point l'interroge sur le métier qu'il aurait rêvé de faire, l'élu normand répond : "Chef d'orchestre". "Malheureusement, je n'avais pas le talent pour cela", ajoute-t-il. A voir lorsqu'il s'agira de mener des ministres à la baguette plutôt que des musiciens. 

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