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La forte hausse des émissions de méthane menace la lutte contre le réchauffement climatique

C'est ce qu'indique une étude parue dans le journal "Earth System Science Data".

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une partie du glacier Perito Moreno (Argentine) tombe dans l'eau, le 10 mars 2016. (WALTER DIAZ / AFP)

Le dioxyde de carbone, le fameux CO2, n'est pas le seul responsable du réchauffement climatique. Le méthane est aussi un gaz à effet de serre et il est encore plus nocif. La flambée de ses émissions depuis dix ans risque d'ailleurs de compromettre la lutte contre le réchauffement, estiment des experts dans une étude parue lundi 12 décembre, dans le journal Earth System Science Data (en anglais).

Pourquoi le méthane est-il nocif ?

Deuxième gaz à effet de serre lié aux activités humaines, après le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) contribue pour quelque 20% au réchauffement en cours. Jusqu'ici, les mesures contre le réchauffement se sont concentrées sur le CO2, issu pour une grande part des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) et qui représente 70% des gaz à effet de serre. Or, à quantité égale, le méthane est 28 fois plus "réchauffant" que le CO2. Toutefois, le méthane persiste moins longtemps dans l'air (environ dix ans, contre une centaine d'années pour le CO2). 

Après un léger ralentissement entre 2000 et 2006, les concentrations augmentent de plus en plus vite depuis 2007, avec en particulier une forte accélération en 2014 et 2015. "Il faut de toute urgence s'attacher à quantifier et réduire les émissions de méthane", plaident dans un éditorial ces chercheurs, qui ont coordonné un bilan mondial mené par plus de 80 scientifiques de 15 pays.

"Contenir le réchauffement sous 2°C est déjà un défi considérable", soulignent ces mêmes chercheurs dans le bulletin Environmental Research Letters (en anglais), à propos de l'objectif que la communauté internationale s'est fixé fin 2015 dans l'accord de Paris. "Un tel objectif deviendra de plus en plus difficile à tenir si l'on ne réduit pas les émissions de méthane fortement et rapidement", ajoutent-ils.

D'où provient ce gaz à effet de serre ?

Les activités humaines sont responsables à 60% des émissions de ce gaz à effet de serre. Environ 36% viennent de l'agriculture (digestion des ruminants, fermentation des fumiers, culture du riz) et du traitement des déchets. Le reste provient majoritairement de l'exploitation du charbon, du pétrole et du gaz : de l'extraction jusqu'aux réseaux de distribution, les fuites de méthane sont très fréquentes.

Dans un entretien au journal du CNRS, Marielle Saunois, enseignante-chercheuse en physique-chimie de l’atmosphère au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE), qui a participé à l'étude, précise qu'il existe aussi "les sources d’origine naturelle, qui contribuent pour 40% environ aux émissions de méthane". 

Parmi les sources naturelles se trouvent les zones humides : "marais, mangroves, mares de dégel du permafrost arctique", qui libèrent du méthane synthétisé par des bactéries anaérobies (qui vivent dans des milieux privés d’oxygène). Il existe par ailleurs des phénomènes de "dégazage naturel qui libèrent le méthane fossile piégé dans le sous-sol", précise-t-elle.

Comment expliquer la hausse de la concentration de méthane ?

"On n’a pas encore réussi à identifier clairement une cause plutôt qu’une autre", explique Marielle Saunois. Les chercheurs formulent plusieurs hypothèses pour tenter d'expliquer cet emballement. "Cela peut être d'origine naturelle, selon Philippe Bousquet, coauteur de l'étude, cité par l'AFP. Mais s'il se prolongeait au-delà de trois ou quatre ans, cela signifierait forcément un lien avec l'homme."

Les scientifiques privilégient la piste de l'exploitation agricole pour expliquer la hausse des émissions. Selon la FAO, le nombre de têtes de bétail est passé de 1,3 milliard en 1994 à 1,5 milliard vingt ans plus tard. Mais ils n'excluent pas non plus le rôle des énergies fossiles. "A partir des années 2000, il y a eu une grosse exploitation du charbon en Chine, et l'exploitation du gaz aux Etats-Unis a aussi augmenté", rappelle Marielle Saunois.

Une autre grande crainte des climatologues concerne le permafrost, ce sol gelé des hautes latitudes, qui peut dégager du méthane en dégelant. Mais à ce stade, "on ne voit pas d'augmentation anormale des concentrations", assure Philippe Bousquet, pour qui ces "émissions risquent d'augmenter dans le temps mais sur des décennies".

Quant au boom spectaculaire des deux dernières années, les scientifiques ont encore plus de mal à l'expliquer.

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