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La patate chaude des retraites bientôt au menu du gouvernement

La réforme Woerth-Fillon de 2010 ne permettra pas d'endiguer le déficit du système des retraites d'ici à 2020. Le gouvernement actuel va devoir plancher sur une nouvelle réforme.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Le président de la République à Paris, le 9 juillet 2012. (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

C'est le dossier qui fait trembler tous les gouvernements, de gauche comme de droite. Alain Juppé en 1995, Jean-Pierre Raffarin, en 2003, et François Fillon, en 2010, ont dû faire face à des mouvements sociaux. Lionel Jospin s'est vu reprocher de n'avoir pas mené à son terme une réforme lorsqu'il était Premier ministre. Cet épineux dossier va également toucher François Hollande et Jean-Marc Ayrault, qui ne devraient pas échapper à une réforme des retraites et à son lot de remous sociaux. Explications.

Le système des retraites toujours déficitaire

En 2010, la réforme concoctée par Eric Woerth et François Fillon devait permettre le retour à l'équilibre du système des retraites à l'horizon 2020. Avec deux mesures phares : l'allongement de la durée de cotisation de 40 à 41,5 années et le report de l'âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Conséquence : quatorze journées de manifestations.

Mais selon le Conseil d'orientation des retraites (COR), chargé l'été dernier par Jean-Marc Ayrault de dresser un état des lieux, la réforme de 2010 n'a pas eu les effets escomptés. Le système accuserait en 2020 un déficit de 20,1 à 24,9 milliards d'euros, observe le conseil dans un rapport à paraître mercredi. Ces chiffres sont d'autant plus inquiétants qu'ils ont été élaborés selon des hypothèses dont le plus optimiste qui parie par exemple sur un taux de chômage de long terme de 7% (contre 10,7% actuellement).

Conclusion : sauf à laisser filer les déficits publics, une nouvelle réforme des retraites va devoir être mise en œuvre durant le quinquennat. Cela tombe bien : il s'agit d'un engagement de campagne de François Hollande. En juillet, lors de la conférence sociale, Jean-Marc Ayrault avait annoncé qu'une commission d'experts lancerait en début d'année des pistes de réformes en s'appuyant sur le rapport du COR, avant une concertation avec les partenaires sociaux au printemps.

Trois leviers possibles, tous gênants pour l'exécutif

Posé ce constat, le COR a étudié comment il faudrait procéder pour parvenir à un retour à l'équilibre en 2020. Trois leviers d'action peuvent être utilisés. Mais aucun n'est vraiment satisfaisant pour le gouvernement.

Augmenter les cotisations. En utilisant ce seul levier, il faudrait augmenter de 1,1% le niveau des cotisations pour atteindre l'équilibre en 2020. Une solution qui pèserait sur le pouvoir d'achat des salariés et renchérirait le coût du travail pour les entreprises. Pour le patronat, une hausse des cotisations serait inacceptable alors que le gouvernement vient de présenter un plan pour la compétitivité.

Reculer l'âge de départ à la retraite. Selon le COR, une autre solution pourrait être de reculer l'âge effectif de départ à la retraite de six mois. Cet âge, actuellement de 62 ans, devrait augmenter d'un an d'ici à 2020 du fait de la réforme de 2010. Reculer cet âge de six mois supplémentaires (donc jusqu'à 63,5 ans) impliquerait d'augmenter la durée de cotisation, l'âge légal de départ, ou bien l'âge de départ à taux plein. La présidente du Medef, Laurence Parisot, a par exemple plaidé mardi pour une augmentation de l'âge légal à 63 ans (au lieu de 62) et de la durée de cotisation à 43 ans (au lieu de 41,5).

Mais pour le gouvernement, agir sur l'âge de départ serait risqué politiquement, la gauche ayant durement combattu la réforme Woerth-Fillon. Une telle décision serait d'autant plus illisible que l'une des premières décisions du gouvernement fut de permettre aux personnes ayant commencé à travailler à 18 ou 19 ans de partir dès 60 ans.

Baisser les pensions de retraite. C'est le troisième levier d'action possible. S'il était choisi, il faudrait, selon le COR, diminuer de 5% le rapport entre les pensions moyennes et les revenus moyens. "Même le socialiste le plus idéologue ne va pas aller jusqu'à demander qu'on baisse les pensions !" s'est insurgé le président de l'UMP, Jean-François Copé, sur BFMTV.

Et pourtant... "A court terme, l'exécutif envisage sérieusement de désindexer, au moins partiellement, les pensions (qui suivent aujourd'hui l'inflation) sans aller jusqu'à un gel complet", croient savoir Les Echos. Le quotidien économique remarque que pour faire accepter cette mesure impopulaire, le gouvernement pourrait s'appuyer sur le fait que le niveau moyen des pensions de retraite sera, en 2020, 6% à 7% plus élevé qu'en 2011.

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