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Présidentielle : pourquoi Emmanuel Macron ou Marine Le Pen ne pourront pas se réjouir au soir de leur élection

Pour les candidats d'En marche ! et du Font national, le plus dur reste à faire. Remporter le second tour, mais aussi gouverner. Car les résultats du premier tour montrent une France fragmentée et des électorats défiants.

Article rédigé par Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Emmanuel Macron est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle avec 24,01% des voix devant Marine Le Pen, qui a obtenu 21,30%, selon les résultats définitifs publiés lundi 24 avril par le ministère de l'Intérieur. (ERIC FEFERBERG / JOEL SAGET / AFP)

Deux finalistes mais une France fragmentée. Quel que soit le vainqueur de l'élection présidentielle, dimanche 7 mai, sa tâche s'annonce extrêmement compliquée. C'est le constat d'une enquête d'opinion réalisée avant le premier tour, du 19 au 22 avril, pour "comprendre le vote des Français", par Ipsos/Sopra Steria pour France Télévisions, Radio France, LCP, Public Sénat, RFI, France 24, Le Point et Le Monde*.

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Que ce soit Emmanuel Macron ou Marine Le Pen qui accède à l'Elysée, leur chemin paraît semé d'embûches. Personnalités et programmes jugés inquiétants, pessimisme des Français, fragmentation et hostilité des électorats... Franceinfo vous explique pourquoi le futur vainqueur du second tour aura fort à faire. 

Leurs personnalités sont jugées inquiétantes 

A la veille du premier tour, "les principaux candidats inquiètent tous plus qu’ils ne rassurent, que ce soit par rapport à leur programme ou même leur personnalité", explique d'emblée l'institut Ipsos. Selon cette enquête, 59% des personnes interrogées sont plutôt inquiètes par la personnalité de Marine Le Pen, contre 22% de personnes rassurées (19% ne sont ni l'un, ni l'autre).

  (IPSOS/SOPRA STERIA)

Pour Stéphane Zumsteeg, directeur du département Opinion et recherche sociale de l'institut de sondage, Marine Le Pen incarne un parti qui "continue d'inquiéter les Français".

Le FN est toujours considéré par une majorité des Français comme un parti dangereux et pas forcément démocratique.

Stéphane Zumsteeg

à franceinfo

Si Emmanuel Macron inquiète moins que sa rivale, pas de quoi se réjouir pour autant pour le candidat d'En marche !. Selon cette enquête Ipsos/Sopra Steria, 37% des personnes interrogées sont plutôt inquiètes par sa personnalité quand 28% sont plutôt rassurées (35% ne sont ni l'un, ni l'autre). Pour Stéphane Zumsteeg, tout ce qui a pu être reproché à l'ancien ministre de l'Economie pendant la campagne "a imprimé" "'robinet d'eau tiède, banquier, trop libéral..." Une hostilité généralisée pour les deux finalistes de la présidentielle qui traduit un "rejet manifeste des politiques" qu'Ipsos mesure "depuis des années".

Leurs programmes sont loin de faire l'unanimité

Le jugement des Français vis-à-vis des programmes des deux finalistes de la présidentielle est à l'avenant. Ils sont ainsi 60% à s'inquiéter de celui de Marine Le Pen (contre 22% de rassurés et 19% ni l'un, ni l'autre). Le programme de la candidate FN "inquiète par la radicalité des mesures qui pourraient être mises en place si elle était élue présidente de la République", indique Stéphane Zumsteeg.

Sur cette question, Emmanuel Macron s'en sort un peu mieux : 39% des personnes interrogées se montrent inquiètes face au programme du candidat d'En marche !, 26% sont rassurées (35% ont répondu ni l'un ni l'autre). En cause : "Un programme jugé trop flou, trop libéral..."

Autant d'éléments qui "ne sont pas de nature à rassurer les électeurs", constate l'expert d'Ipsos. Ces chiffres traduisent une "vraie méfiance à l'égard des deux candidats qualifiés pour le second tour", analyse Stéphane Zumsteeg.

  (IPSOS/SOPRA STERIA)

Les Français sont pessimistes sur l'avenir

Si Emmanuel Macron est élu président de la République, seules 24% des personnes interrogées estiment que la situation de la France s'améliorera dans les années à venir. Ils sont même 37% à penser qu'elle se dégradera et 39% penchent pour un statu quo. En cas d'élection de Marine Le Pen, les Français se montrent encore plus pessimistes : 58% pensent que la situation se dégradera quand 22% estiment qu'elle s'améliorera (20% ont répondu ni l'un ni l'autre).

Quel que soit le prochain locataire de l'Elysée, il peut déjà faire une croix sur un quelconque état de grâce. "Traditionnellement, le chef de l'Etat nouvellement élu bénéficiait d'une bienveillance relative à l'égard de son action et de sa personnalité. Même si l'on était contre le candidat élu, on lui laissait sa chance pour une sorte de période d'adaptation", pointe Stéphane Zumsteeg.

L'état de grâce de François Hollande a été de courte durée, on peut s'attendre à ce que l'opinion publique soit dès le début du quinquennat très vigilante et sans concession à l'égard du prochain président de la République.

Stephane Zumsteeg

à franceinfo

Ils ne convainquent pas au-delà de leur électorat

Avec 24,01% des voix pour Emmanuel Macron et 21,30% pour Marine Le Pen, un constat s'imposera pour le futur vainqueur de la présidentielle : "La défiance est majoritaire dans une logique de premier tour où une immense majorité des Français n'a pas voté pour Emmanuel Macron ou pour Marine Le Pen", assure Stéphane Zumsteeg.

Par ailleurs, le choix des électeurs a été "très tranché", analyse l'expert d'Ipsos. Malgré la présence de onze candidats, l'offre politique n'a pas satisfait les Français, comme le montre cette enquête. "Lors de cette campagne jugée 'dure' par les Français, ils se sont montrés uniquement satisfaits du candidat qu'ils avaient soutenu. En revanche, les électeurs éprouvent une réelle hostilité à l'égard des candidats qu'ils n'ont pas soutenus", poursuit Stéphane Zumsteeg.

En dehors des électeurs d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen, ceux de Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et de François Fillon se montrent donc majoritairement défiants vis-à-vis des finalistes du second tour. "L'électorat qui a voté pour Benoît Hamon ou Jean-Luc Mélenchon peut voter Emmanuel Macron au second tour pour faire barrage au Front national. Mais ce vote ne sera pas un vote d'adhésion et n'entraînera aucune bienveillance en cas d'élection", note Stéphane Zumsteeg. Même chose pour ceux de François Fillon qui souhaiteraient s'opposer à Marine Le Pen : "Ils redoutent que le candidat d'En marche ! soit l'héritier de François Hollande."

* Etude réalisée du 19 au 22 avril sur un échantillon de 4 698 personnes, interrogées sur internet, selon la méthode des quotas.

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