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Comment la "boîte à outils" de Hollande s'est transformée en boulet

C'est l'expresssion la plus commentée, et raillée, au lendemain de la prestation du président sur France 2. 

Article rédigé par Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
François Hollande, le 28 mars 2013, à France Télévisions, pour un entretien avec David Pujadas. (FRANCE 2 / AFP)

L'expression est commentée, disséquée, raillée au lendemain de l'interview de François Hollande sur France 2. Le chef de l'Etat y a employé jeudi 28 mars à plusieurs reprises le terme "outils" pour défendre son action en matière de croissance et d'emploi. Mais vendredi matin, la "boîte à outils" est devenue la principale cible des tirs de l'UMP. Voici comment le choix de ce terme s'avère être une fausse bonne idée.

1Hollande fait la promotion de ses instruments anti-crise

Lors de son entretien avec David Pujadas, l'un des principaux objectifs du président de la République consiste à rassurer les Français. Malgré la crise économique, en dépit de la dégradation continue des chiffres du chômage, l'exécutif veut montrer qu'il agit. Pacte de compétitivité, réforme du marché du travail, emplois d'avenir, contrats de génération... François Hollande fait longuement la promotion des "outils" mis en place par la majorité pour l'emploi et le retour de la croissance, assurant le service après-vente de chacune des réformes engagées. Et il incite notamment les entreprises à "les utiliser pleinement". Une façon de convaincre que la "boîte à outils" existe bien, il suffirait d'être patient pour obtenir des résultats.

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"Tous les outils sont là", dit le président au début de l'entretien. "Ces outils vont maintenant être mis en œuvre." Face à lui, David Pujadas, seul à l'interroger, parle de "boîte à outils", une expression que François Hollande finit par reprendre à son compte au cours de l'interview. "J’ai le devoir de faire sortir la France de la crise et donc, je vais y mettre tous les moyens. Je vous ai dit, déjà, toute la boîte à outils." Le mot est ensuite réutilisé plusieurs fois par les deux hommes. 

Ce n'est pas la première fois que cette image concrète est utilisée par la majorité, qui en a fait un élément de langage. Dès mercredi, Najat Vallaud-Belkacem, la porte-parole du gouvernement, indique que "le président a l'intention de rappeler le cap qui est le nôtre, les outils que nous avons mis en place pour tenir ce cap (...)". Et le 18 mars, face à l'impopularité grandissante de François Hollande, l'entourage du chef de l'Etat confie au Figaro espérer un changement d'état d'esprit, à force de pédagogie. "La boîte à outils existe, alors sortez les outils", lance l'entourage du président à l'adresse des entreprises. "Cela ne changera pas les difficultés de popularité, mais il y aura appropriation des outils."

2L'opposition raille "monsieur bricolage"

Pour l'UMP, François Hollande ne s'est pas montré à la hauteur de la situation lors de son intervention télévisée. Et l'emploi du terme "outils" en serait la preuve. L'opposition raille un "bricoleur", un "garagiste""La boîte à outils pour le bricolage, d'accord, mais pas pour faire reculer ce qui est l'enjeu numéro un pour les Français : faire reculer le chômage", s'est ainsi moqué vendredi Xavier Bertrand, ancien ministre du Travail UMP, sur France 2.

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Jean-François Copé, président de l'UMP, a vu, lui, un "terme affreux" dans l'expression "boîte à outils". "C'est quoi le président de la République maintenant ? Quelqu'un qui est dans un garage pour réparer une carrosserie ?", a-t-il ironisé au micro de RTL.

Marine Le Pen a, elle, attaqué sur BFMTV : "On ne peut pas apporter des petites réponses sorties d'une petite boîte à outils de bricolage". "C'était du bricolage", a-t-elle insisté. 

3Un choix qui "abaisse la fonction présidentielle"

François Hollande a-t-il eu raison de parler d'outils et de boîte à outils pour expliquer sa politique ? Les railleries de l'opposition étaient-elles prévisibles ? Pour Mariette Darrigrand, sémiologue, il s'agit d'un choix "catastrophique". Contactée par francetv info, cette spécialiste des mots et des images médiatiques estime que le président "a réduit une grande chose, la politique, à une petite chose, le bricolage".

"Le bricolage renvoie au quotidien, un travail sans finalité claire, un peu brouillonne", commente la sémiologue. "François Hollande parle de la 'maison France' et de sa 'boîte à outils', mais c'est réducteur. Cela minimise et abaisse la fonction présidentielle, comparée à l'image du père de famille qui bricole."

Comment expliquer l'emploi de ces termes qui se révèle malheureux ? "On sent très bien le mauvais choix de communicant, note la sémiologue. Certainement quelqu'un qui a dû vouloir faire parler le président avec un terme du quotidien, qui est en fait trivial. A l'évidence, il s'agissait d'une perche tendue aux opposants."

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